En 1069, l’Empire byzantin se trouve dans une situation critique. Depuis la prise d’Ani en 1063 et le sac de Césarée en 1067, les Seldjoukides, dirigés par Alp Arslan, étendent leur domination à travers l’Asie Mineure. Ces campagnes successives désorganisent les territoires byzantins et dévoilent la faiblesse militaire de l’empire dans cette région. À cette époque, l’Asie Mineure, cœur agricole et économique de Byzance, est en proie à des incursions incessantes, mettant à mal l'autorité impériale et plongeant les habitants dans un climat de peur.
L’empereur Constantin X Doukas (1059-1067) est critiqué pour sa gestion passive de la situation, laissant l’armée d’Orient sous-équipée et démoralisée. Son successeur, Romain IV Diogène, monte sur le trône en 1068 avec une ambition de restaurer la puissance byzantine. Avant même son célèbre affrontement de Mantzikert en 1071, il lance plusieurs campagnes militaires dans le but de sécuriser les frontières orientales. C’est dans ce contexte tendu que survient la bataille d'Iconium.
Iconium (aujourd’hui Konya, en Turquie), une ville stratégique située sur un axe crucial reliant l’Anatolie intérieure à Constantinople, devient le théâtre d’un affrontement décisif. L'armée byzantine d'Orient, bien que réduite en nombre et en moyens, décide de lancer une contre-attaque audacieuse pour reprendre cette cité des mains des Seldjoukides.
Sous le commandement d’un général expérimenté, les Byzantins déploient une stratégie classique d’embuscade et de siège. Les forces seldjoukides, bien qu’agiles et expertes dans les tactiques de harcèlement, sont surprises par la détermination des Byzantins. Après plusieurs jours de combats sporadiques, les Byzantins parviennent à repousser les Turcs hors d’Iconium, restaurant temporairement le contrôle impérial sur la ville.
Cette victoire, bien que symbolique, montre que l’armée byzantine conserve encore une certaine capacité à s’adapter face à un ennemi mobile et bien organisé. Cependant, le succès d’Iconium n’est pas suivi d’une consolidation stratégique, car les ressources nécessaires pour maintenir le contrôle sur la région sont insuffisantes.
Le répit offert par la reprise d’Iconium est de courte durée. En 1071, la défaite écrasante de Mantzikert face à Alp Arslan brise définitivement la capacité militaire de l’Empire byzantin à défendre efficacement ses territoires orientaux. Les troubles internes qui suivent, exacerbés par des luttes de pouvoir et des guerres civiles, empêchent toute reprise sérieuse des territoires perdus.
Après la première croisade en 1097, Iconium est brièvement reprise par les forces chrétiennes. Cependant, cette victoire est fugace : dès 1101, les Seldjoukides récupèrent la ville, qui devient rapidement la capitale du sultanat de Roum sous le nom de Konya. Cette cité prospère devient l’un des centres culturels et politiques les plus puissants de l’Anatolie seldjoukide, posant une menace constante pour l’avenir de Byzance. Konya symbolise la transformation de l'Asie Mineure, jadis bastion chrétien, en une région majoritairement musulmane.
La bataille d’Iconium de 1069 met en lumière les défis insurmontables auxquels Byzance est confrontée : une armée affaiblie, des frontières poreuses, et des rivalités internes. Bien qu’elle représente une victoire ponctuelle, elle ne peut inverser le déclin à long terme de l’autorité byzantine en Anatolie. L’établissement du sultanat de Roum à Iconium illustre un basculement géopolitique majeur, scellant l’affaiblissement durable de l’Empire byzantin dans la région.
Sources et Références :
Auteur : Stéphane Jeanneteau, août 2014.