3 min lu
La Bataille de la Neva (1240) : Mythe et Réalité.

La bataille de la Neva, qui aurait eu lieu le 15 juillet 1240, est une confrontation entre les forces de la république de Novgorod et celles du royaume de Suède. Elle intervient dans un contexte d’intenses rivalités territoriales et religieuses dans le nord-est de l’Europe, alors que les puissances chrétiennes cherchent à étendre leur influence. La Suède ambitionne de s'établir dans la région de la Neva, clé stratégique pour le contrôle du commerce et des routes fluviales.

La situation suédoise

  • À l’époque, la Suède était déchirée par des luttes internes, presque proche d’une guerre civile. Cette situation affaiblissait ses capacités militaires et organisationnelles.
  • Aucun document suédois contemporain ne mentionne cette bataille, ce qui soulève des questions sur sa portée réelle ou sur l’ampleur de l’affrontement.

La situation novgorodienne

  • Novgorod, dirigée par le jeune Alexandre Iaroslavitch (plus tard Alexandre Nevski), faisait face à des pressions tant internes qu’externes, notamment de la part des ordres religieux-militaires allemands et des Mongols.
  • Alexandre, à 19 ans, est élu prince de Novgorod en 1236 et cherche à affirmer son autorité face aux incursions étrangères.

Déroulement Supposé de la Bataille

Sources et incertitudes

La bataille n’est documentée que par une source russe contemporaine, le Chroniqueur de Novgorod, qui offre peu de détails. Le récit est succinct et exagéré dans sa dimension héroïque.

Effectifs et pertes

  • Côté russe : Les forces comprenaient des troupes de Novgorod et des milices locales, totalisant plusieurs centaines d’hommes.
  • Côté suédois : Une flotte suédoise non spécifiée, renforcée par des alliés finlandais ou norvégiens.
  • Les pertes mentionnées dans les sources russes sont modestes : trois habitants de Novgorod et une vingtaine de miliciens locaux tués contre « deux pleins bateaux de cadavres » suédois.

Le mythe d'Alexandre Nevski

Le récit glorifie le rôle d’Alexandre, décrivant sa bravoure et son rôle décisif dans la victoire. Bien que le déroulement exact reste flou, cette bataille a été utilisée pour asseoir sa réputation et sa légitimité politique.


Conséquences et Héritage

1. Conséquences politiques

  • Affirmation de Novgorod : La victoire, réelle ou embellie, renforça la position de Novgorod face à ses voisins et contribua à limiter les ambitions suédoises dans la région.
  • Renforcement d’Alexandre Nevski : Ce succès permit à Alexandre de s’imposer comme un héros national, le protégeant des critiques internes et lui donnant une stature militaire et politique.

2. Lien distendu avec la Scandinavie

  • Au-delà de la dimension militaire, la bataille illustre un détachement progressif entre les Russes et les Scandinaves. Alors qu'au siècle précédent, des liens matrimoniaux fréquents unissaient les deux régions, l’autonomie croissante des principautés russes contribua à creuser le fossé.

3. Construction de la légende

  • La bataille de la Neva fut plus tard magnifiée pour glorifier Alexandre Nevski, qui devint une figure emblématique de la résistance russe face aux envahisseurs étrangers. Ce mythe fut réutilisé par l'Église orthodoxe et, plus tard, par l’Union soviétique dans un contexte de nationalisme.

Analyse : Mythe ou Réalité ?

Un affrontement symbolique

Bien que les preuves historiques soient limitées, la bataille de la Neva a une forte valeur symbolique. Elle est interprétée comme un point tournant dans l’affirmation de Novgorod et, plus largement, de l’identité russe face aux influences étrangères.

Un impact militaire modéré

L’absence de mentions suédoises et le faible nombre de pertes décrites dans les sources russes suggèrent que la bataille était de moindre ampleur. Il est possible qu’elle n’ait été qu’un escarmouche glorifiée pour des raisons politiques.




Sources et Références

  1. The Chronicle of Novgorod.
  2. Vernadsky, George, Kievan Russia.
  3. Hosking, Geoffrey, Russia and the Russians: A History.
  4. Plokhy, Serhii, The Origins of the Slavic Nations.

Auteur : Stéphane Jeanneteau, août 2014