En 1241, l’Europe centrale est frappée par une invasion massive des Mongols, dirigée par Batu Khan, petit-fils de Gengis Khan, et son stratège Subötaï. Après avoir conquis la Russie, les Mongols se tournent vers les royaumes d'Europe. Le royaume de Hongrie, sous le règne de Béla IV, est une cible clé en raison de sa situation stratégique et de son potentiel à entraver la progression mongole.
L’attaque survient alors que la Hongrie est politiquement affaiblie. Béla IV a récemment accueilli les Coumans, un peuple chassé par les Mongols, suscitant des tensions internes. Malgré ses appels à l'aide aux autres souverains européens, Béla IV ne reçoit qu'un soutien limité. Lors de la campagne de 1241, les Mongols progressent rapidement en utilisant des tactiques de terreur, semant destruction et chaos sur leur passage.
La bataille de Muhi, également appelée bataille de la Sajó, commence avant l'aube. Les Mongols utilisent un bombardement intensif pour démoraliser les défenseurs hongrois. Des flèches, des pierres et peut-être des pétards chinois ou d'autres formes d'explosifs rudimentaires sont utilisés, créant une panique parmi les Hongrois. Certains historiens avancent que cette préparation d'artillerie pourrait être l’une des premières de l’histoire militaire européenne.
Cette première phase provoque une confusion totale. Alors que les défenseurs tentent de contenir l’assaut sur le pont, ils découvrent rapidement qu’il s’agit d’une attaque de diversion.
Les Mongols, avec leur mobilité exceptionnelle, ont déjà traversé la rivière Sajó plus au sud, évitant le point de résistance principal. Deux tümens, soit environ 20 000 cavaliers, frappent les flancs et l’arrière de l’armée hongroise, semant le chaos. Pris en tenaille, les défenseurs hongrois sont contraints de se replier dans leur camp fortifié, où ils sont rapidement encerclés.
Dès l’aube, les Mongols intensifient leurs attaques avec des bombardements constants, utilisant des pierres, des flèches et du naphte brûlant. À 7 heures, le camp hongrois est totalement investi, et la résistance s’effondre. Ceux qui tentent de s’échapper tombent dans des embuscades tendues par des cavaliers mongols montés sur des chevaux frais.
Les Mongols poursuivent sans relâche les survivants, les traquant dans les marais et les villages environnants. En quelques heures, l'armée hongroise est annihilée. On estime que 40 000 à 70 000 soldats hongrois périssent, y compris de nombreux dignitaires religieux et politiques, tels que les archevêques d'Esztergom et de Kalocsa. Le prince Coloman, frère du roi, est gravement blessé et succombe peu après à ses blessures.
Le roi Béla IV échappe de justesse à la capture avec seulement trois compagnons. Il se réfugie à Zagreb, mais son royaume est en ruines. Pest, la capitale, tombe rapidement entre les mains des Mongols, qui incendient la ville et massacrent sa population. Cette victoire ouvre la voie aux Mongols pour saccager une grande partie de la Hongrie.
La défaite de Muhi expose la vulnérabilité du royaume hongrois. Les Mongols, après avoir traversé le Danube gelé durant l’hiver suivant, ravagent le pays, provoquant une crise humanitaire majeure. La population hongroise est décimée, et les infrastructures du royaume sont détruites.
Cependant, en 1242, les Mongols se retirent soudainement après la mort du Grand Khan Ögödei. Cet événement force Batu Khan à retourner en Asie pour participer à la succession, épargnant ainsi le reste de l'Europe d'une destruction totale.
Après la bataille de Muhi et les ravages mongols, Béla IV entreprend une réforme complète de son royaume. Il renforce les fortifications, établit des châteaux en pierre, et réorganise l’armée pour mieux résister à d'éventuelles futures invasions. De plus, il accorde des privilèges accrus à la noblesse et à la population pour encourager la reconstruction.
La bataille de Muhi marque un tournant dans l'histoire hongroise, soulignant l'importance d'une défense efficace face à des adversaires utilisant des tactiques de guerre avancées.
Auteur : Stéphane Jeanneteau, février 2015.