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La Bataille de Taillebourg (1242) : Une Victoire Capétienne face à la Révolte Poitevine et l’Angleterre.

Une Nouvelle Révolte des Lusignan

Depuis la confiscation du Poitou à Jean sans Terre en 1202, le duché était devenu une possession capétienne. Cependant, la noblesse poitevine, jalouse de ses privilèges, restait hostile à l’autorité royale. Ce ressentiment fut exacerbé par la politique centralisatrice des Capétiens, notamment avec l’apanage d’Alphonse de Poitiers, frère cadet de Louis IX.

Hugues X de Lusignan, figure clé de la noblesse poitevine, devint le chef de file de cette opposition. Soutenu par son épouse Isabelle d’Angoulême, ancienne reine d’Angleterre, il trouva un allié de poids en Henri III d’Angleterre. Ce dernier, cherchant à récupérer ses territoires perdus en France, débarqua à Royan en mai 1242 pour soutenir les révoltés poitevins.

Les Forces en Présence

  • La coalition anglo-poitevine : Composée des forces d'Henri III d’Angleterre, des troupes de Hugues X de Lusignan, et de Raymond VII de Toulouse, cette armée rassemblait des chevaliers anglais, des barons poitevins, et des contingents aquitains.
  • L’armée capétienne : Commandée par Louis IX et son frère Alphonse de Poitiers, elle comptait environ 30 000 hommes, incluant des chevaliers, des fantassins, et des engins de siège. Elle bénéficiait du soutien de seigneurs fidèles comme Geoffroi IV de Rancon.

Le Siège de Taillebourg : Préambule de la Confrontation

Louis IX, décidé à mater la révolte, mena une campagne rapide et méthodique. Après avoir pris plusieurs places fortes des Lusignan (Montreuil-Bonin, Moncontour, Vouvant, et Fontenay-le-Comte), il avança vers Saintes, où les Anglo-Poitevins s’étaient regroupés.

Le château de Taillebourg, un point stratégique sur la Charente, devint le théâtre du premier affrontement. Contrôlé par les Français, il permettait de surveiller le pont reliant le Poitou au sud de la Saintonge, essentiel pour les mouvements de troupes.

Les Préludes de la Bataille

Le 19 juillet 1242, les armées ennemies se firent face de part et d’autre du pont. L’occupation française du château leur donnait un avantage stratégique, tandis que les Anglo-Poitevins hésitaient à lancer une attaque directe.


La Bataille de Taillebourg (21 juillet 1242)

Une Charge Décisive

Le 21 juillet, les Français prirent l’initiative. Depuis le château, les chevaliers capétiens menèrent une charge massive sur les troupes anglo-poitevines. Surprises et désorganisées, celles-ci furent rapidement bousculées et forcées à battre en retraite. L’un des commandants français, Archambaud VIII de Bourbon, fut mortellement blessé dans l’assaut.

Malgré des pertes limitées, la victoire permit aux Français de sécuriser le pont de Taillebourg, un passage crucial pour la poursuite de la campagne.


La Bataille de Saintes (23 juillet 1242)

Un Affrontement Décisif

Deux jours plus tard, les deux armées s’affrontèrent à nouveau sous les murs de Saintes. Cette fois, les Français mirent en déroute l’armée anglo-poitevine dans un combat décisif. Les forces d’Henri III et de Hugues X furent écrasées, et les vaincus furent contraints à une retraite désordonnée vers le sud.


Conséquences : Une Consolidation Capétienne

Pour la France

La victoire de Taillebourg marqua un tournant dans la politique capétienne. Louis IX renforça son autorité sur le Poitou et réaffirma la domination française sur les territoires contestés. La trêve de Pons, signée le 1er août 1242, mit fin aux hostilités avec l’Angleterre, et le traité de Paris (1259) scella une paix durable.

Alphonse de Poitiers confisqua un tiers des châteaux de Hugues X de Lusignan et consolida son apanage. Cette victoire permit aussi à la monarchie capétienne de renforcer son autorité face à la noblesse rebelle.

Pour l’Angleterre

Henri III, humilié par cette défaite, fut contraint de renoncer à ses ambitions sur le Poitou. Il concentra ses efforts sur la consolidation de ses territoires en Aquitaine et sur la gestion des tensions internes en Angleterre.

Pour les Révoltés

Hugues X de Lusignan subit des sanctions sévères : confiscations de terres et perte de revenus royaux. Raymond VII de Toulouse, quant à lui, dut signer la paix de Lorris en 1243, confirmant les clauses défavorables du traité de Paris de 1229.


Auteur : Stéphane Jeanneteau, août 2014
Sources et Références :

  • Jean Favier, Saint Louis
  • Georges Duby, Le Moyen Âge en lumière
  • Encyclopédie Britannica, édition 2023
  • Chroniques de Mathieu Paris, contemporaines des événements