4 min lu
La Bataille d’Anzen (838) : Une Défaite Marquante des Byzantins.

La bataille d'Anzen, survenue en 838, est l'un des événements les plus importants des guerres arabo-byzantines du IXe siècle. Elle marque une lourde défaite pour l'empereur Théophile face aux Abbassides dirigés par Al-Mu’tasim. Cette bataille, suivie du sac d’Amorium, a des répercussions profondes sur le prestige byzantin, la situation militaire, et le débat religieux autour de l’iconoclasme.


Contexte : Une Escalade des Hostilités

Les ambitions de Théophile

Théophile, monté sur le trône en 829, cherche à consolider son pouvoir par des campagnes militaires contre les Abbassides. En 837, il mène une offensive qui pille plusieurs cités, notamment Sozopetra, ville natale d’Al-Mu’tasim.

La réponse abbasside

En représailles, Al-Mu’tasim lance une expédition punitive en 838 :

  • Cible symbolique : Amorium, la plus grande ville d’Anatolie et berceau de la dynastie amorienne, devient l’objectif principal.
  • Division des forces : Deux armées, dirigées respectivement par Al-Mu’tasim et Afchin, convergent vers l’Anatolie.

Déroulement de la Bataille

La stratégie byzantine

Théophile mobilise une armée importante (25 000 à 40 000 hommes selon les sources) pour intercepter les forces d’Afchin avant leur jonction avec celles d’Al-Mu’tasim :

  • Position défensive : L’empereur campe sur une colline de la plaine de Dazimonitis, près de Dazimon.
  • Débats stratégiques : Contre l’avis de certains officiers, Théophile décide de lancer l’attaque au matin plutôt que d’opter pour une embuscade nocturne.

Le déroulement de la bataille

  • Première phase : L’armée byzantine prend l’avantage, infligeant de lourdes pertes aux forces arabes.
  • Contre-attaque arabe : Afchin lance ses archers à cheval turcs, perturbant l’avancée byzantine.
  • Effondrement des lignes byzantines : La rumeur de la mort de Théophile provoque la panique parmi les soldats, transformant le repli en déroute.

Théophile, isolé avec ses troupes d’élite et les Khurramites sur une colline, parvient à percer les lignes arabes et à se replier grâce à une averse qui neutralise les arcs ennemis.


Conséquences immédiates

Pillages et sac d’Amorium

  • Chute d’Amorium : La ville tombe après un siège de deux semaines. Près de 35 000 habitants sont capturés et vendus comme esclaves.
  • Un coup symbolique : La destruction d’Amorium est un revers majeur pour Byzance, tant sur le plan militaire que psychologique.

Fragilisation de Théophile

  • Rumeurs et révoltes : La défaite à Anzen affaiblit la position de Théophile. Une rébellion menée par les Khurramites et Théophobos éclate, bien qu’elle soit finalement réprimée.
  • Impact sur l’iconoclasme : L’échec militaire érode la légitimité de la politique iconoclaste, qui dépendait de la réussite des campagnes impériales.

Conséquences à long terme

L’impuissance des Abbassides

Malgré leur succès initial, les Abbassides ne parviennent pas à exploiter pleinement leur victoire :

  • Retrait rapide : Les nouvelles d’une rébellion interne obligent Al-Mu’tasim à retirer ses troupes.
  • Stabilisation des frontières : Les Abbassides n’étendent pas leur contrôle au-delà d’Amorium.

Changements dans la stratégie byzantine

La bataille met en lumière les faiblesses de l’armée byzantine face aux archers montés :

  • Évolution tactique : Les Byzantins commencent à adapter leur stratégie pour contrer cette menace.
  • Préfiguration des conflits avec les Turcs : Cette bataille marque la première confrontation majeure avec des Turcs nomades, annonçant les défis futurs posés par les Seldjoukides.

Fin de l’iconoclasme

La défaite et le sac d’Amorium discréditent l’iconoclasme. Peu après la mort de Théophile en 842, son successeur rétablit la vénération des icônes, scellant la fin de cette controverse religieuse.


 

La bataille d’Anzen et le sac d’Amorium symbolisent l’un des revers les plus graves de Byzance au IXe siècle. Bien qu’elles n’entraînent pas de conséquences militaires durables, ces défaites affaiblissent temporairement la position impériale et accélèrent la chute de l’iconoclasme. Sur le plan stratégique, ces événements marquent également un tournant dans les relations entre Byzance et les Abbassides, ouvrant une période de relative stabilité.

  

Sources et Références :

  • Théophane Continué, Chronique.
  • Warren Treadgold, A History of the Byzantine State and Society.
  • John Haldon, The Byzantine Wars.

Auteur : Stéphane Jeanneteau, février 2012.