Après leur défaite à la bataille de Toulouse en 721, les forces arabo-berbères ralentissent leurs incursions dans les terres au-delà des Pyrénées pour se réorganiser. En 730, ʿAbd Ar-Raḥmān ibn ʿAbd Allāh Al-Ghāfiqī est nommé gouverneur d'Al-Andalus et entreprend une ambitieuse campagne pour étendre l’influence omeyyade dans le Royaume franc.
Rassemblant une armée estimée entre 70 000 et 80 000 hommes (bien que ces chiffres soient probablement exagérés par les chroniques médiévales), Al-Ghāfiqī traverse les Pyrénées par Roncevaux en 732. Son avancée rapide à travers l’Aquitaine met en difficulté Eudes, duc d’Aquitaine, déjà affaibli par les incursions précédentes.
Les forces omeyyades atteignent Bordeaux, une ville importante pour l’Aquitaine. Malgré les efforts d’Eudes pour rassembler ses troupes et défendre la cité, l’armée musulmane, plus nombreuse et mieux organisée, inflige une défaite écrasante aux Aquitains.
Le commandant de la garnison de Bordeaux est tué, et la ville tombe aux mains des Omeyyades. Les forces aquitaines, en retraite le long de la Garonne ou de la Dordogne, sont rattrapées et subissent des pertes catastrophiques.
La victoire à Bordeaux permet aux Omeyyades de piller la région et de s’emparer de nombreuses richesses, notamment dans les monastères, symboles de pouvoir spirituel et économique. Cette avancée rapide met à nu la faiblesse de la défense aquitaine et menace directement le cœur du royaume franc.
Après la défaite de Bordeaux, Eudes, jusque-là en conflit avec Charles Martel pour l’indépendance de l’Aquitaine, se trouve contraint de solliciter l’aide de son ancien rival. Cette décision marque un tournant dans la politique du duché, plaçant l’Aquitaine sous l’influence croissante des Francs.
Les Omeyyades, encouragés par leur victoire à Bordeaux, continuent leur avancée en direction du nord. Leur objectif principal devient Tours, célèbre pour ses richesses et son monastère de Saint-Martin. Cependant, leur progression est stoppée à la bataille de Poitiers la même année (732), où l’alliance entre Charles Martel et Eudes leur inflige une défaite décisive.
La bataille de Bordeaux illustre la vulnérabilité des royaumes francs face à une force omeyyade bien organisée et en quête de butin. Bien qu’il s’agisse d’une défaite, elle catalyse la coopération entre Charles Martel et Eudes, une alliance qui sera déterminante pour repousser durablement les incursions musulmanes dans le royaume franc.
Auteur : Stéphane Jeanneteau, décembre 2011.