Contexte historique : La résistance asturienne
Après la chute du royaume wisigoth en 711 face aux Omeyyades, la péninsule Ibérique est rapidement dominée par les musulmans. Cependant, au nord, dans les montagnes cantabriques, des poches de résistance s’organisent. Parmi elles, un noble wisigoth, Pélage (Pelayo), fils de Favila, rassemble des survivants et des exilés dans les Asturies.
- Un bastion de résistance : En 718, Pélage est choisi comme chef et établit sa capitale à Cangas de Onís. Refusant de reconnaître l’autorité des Omeyyades, il lance des attaques contre leurs garnisons locales.
- La réponse omeyyade : Jusqu’en 722, les Omeyyades, concentrés sur des campagnes en Gaule, ne considèrent pas cette révolte comme une menace sérieuse. Mais après leur défaite à Toulouse en 721, le gouverneur d'Al-Andalus, Ambiza, envoie une expédition punitive dirigée par ʿAlqama, accompagnée d’Oppa, frère du roi wisigoth Wittiza, pour mater la rébellion.
Déroulement de la bataille
La stratégie asturienne
Pélage et ses 300 hommes attirent progressivement les troupes omeyyades au cœur des montagnes, jusqu’à Covadonga, un endroit difficile d’accès, entouré de pics escarpés et doté de grottes naturelles idéales pour la défense.
Le combat
- Un piège géographique : Les Omeyyades, supérieurs en nombre, s’engagent dans la vallée. Les Asturiens, positionnés sur les pentes et dans les grottes, attaquent à distance avec des flèches et des pierres, infligeant de lourdes pertes aux forces d’ʿAlqama.
- L’assaut final : Face à la résistance, les Omeyyades tentent de se retirer, mais leur retraite est bloquée par un détachement asturien qui les encercle. Une confusion s’installe, et de nombreux soldats omeyyades meurent, notamment ʿAlqama, piégé dans un glissement de terrain, probablement provoqué par les défenseurs.
Conséquences immédiates
Une victoire symbolique pour les Asturiens
- Bien que numériquement modeste, la victoire renforce la position de Pélage et la légitimité de son autorité. Les Omeyyades subissent des pertes importantes, et leur retraite est harcelée par des villageois asturiens, rendant leur retour à Al-Andalus long et périlleux.
La fin des ambitions omeyyades dans les Asturies
- Après Covadonga, les Omeyyades abandonnent tout effort pour dominer durablement cette région montagneuse. Ils minimisent la défaite dans leurs chroniques, la considérant comme un incident mineur.
L’émergence du royaume des Asturies
- La victoire marque la naissance du royaume des Asturies, premier bastion chrétien résistant à la domination musulmane. Ce royaume devient le point de départ de la Reconquista, qui s’étendra sur près de huit siècles.
Le sanctuaire de Covadonga
- Pélage attribue sa victoire à l’intercession de la Vierge Marie. Un sanctuaire est érigé dans les grottes de Covadonga, devenant un lieu de pèlerinage et un symbole de résistance chrétienne.
Héritage et importance
Un tournant dans l’histoire ibérique
Bien que modeste sur le plan militaire, la bataille de Covadonga marque un tournant symbolique. Elle représente la première victoire chrétienne contre les forces musulmanes, donnant naissance à une résistance qui évoluera en une reconquête progressive de la péninsule Ibérique.
Un mythe fondateur
Les récits chrétiens postérieurs magnifient la bataille, faisant de Pélage un héros légendaire et de Covadonga le point de départ de la libération de l’Hispanie. Ce récit inspire l’identité chrétienne et politique des royaumes du nord.
La continuité de la Reconquista
Covadonga amorce un mouvement de reconquête qui s’accélérera aux siècles suivants. Ce succès préfigure la formation d’autres bastions chrétiens, tels que la Castille et le León.
Sources et Références
- Roger Collins, The Arab Conquest of Spain, 710-797.
- Lévi-Provençal, Histoire de l’Espagne musulmane.
- Chroniques asturiennes (IXe siècle).
Auteur : Stéphane Jeanneteau, décembre 2011.