4 min lu
La Bataille de Krasos (804) : Une Défaite Marquante dans les Guerres Arabo-Byzantines.

La bataille de Krasos, survenue en 804, s’inscrit dans une phase violente des guerres arabo-byzantines sous le règne de Nicéphore Ier (802-811). Déterminé à renforcer le trésor impérial et à restaurer la souveraineté byzantine, Nicéphore met fin au tribut payé aux Abbassides, déclenchant une série d’affrontements. Cette bataille illustre la résilience byzantine face à la pression arabe, malgré une défaite initiale coûteuse.


Contexte : Une Relance des Hostilités

La trêve d’Irène

Sous l’impératrice Irène, Byzance signe une trêve en 798 avec Hâroun ar-Rachîd, acceptant de payer un tribut annuel en échange de la paix. Cette décision, bien qu’impopulaire, permet une pause temporaire dans les hostilités.

Le changement sous Nicéphore Ier

Nicéphore, monté sur le trône en 802, adopte une politique plus agressive :

  • Cessation du tribut : Soucieux de renflouer les caisses de l’État, il refuse de continuer à payer les Abbassides.
  • Consolidation intérieure : Nicéphore réprime une révolte menée par Bardanès Tourkos, consolidant son autorité avant de s’engager dans des campagnes militaires.

La réaction abbasside

Hâroun ar-Rachîd réagit rapidement à la cessation du tribut, ordonnant des raids destructeurs en Asie Mineure. En 804, il envoie une armée sous le commandement d’Ibrahim ibn Jibril pour intensifier la pression sur Byzance.


Déroulement de la Bataille

L’invasion abbasside

En août 804, l’armée abbasside traverse les Portes Ciliciennes et ravage les régions byzantines en Asie Mineure.

  • Nicéphore tente une riposte : Initialement, l’empereur rassemble ses forces pour affronter les envahisseurs, mais il doit abandonner ses plans, probablement en raison d’une conspiration interne.

L’attaque à Krasos

Alors que l’armée byzantine se retire, les Abbassides lancent une attaque surprise près de Krasos, en Phrygie :

  • Une défaite coûteuse : Selon al-Tabari, les Byzantins perdent 40 700 hommes, bien que ce chiffre soit probablement exagéré. Théophane confirme cependant que les pertes sont importantes.
  • Nicéphore blessé : L’empereur lui-même est blessé à trois reprises mais sauvé par le courage de ses officiers.

Conséquences de la Bataille

Un impact immédiat

Malgré leur victoire, les Abbassides ne capitalisent pas sur leur succès :

  • Troubles au Khorasan : Les difficultés internes au califat, notamment dans la province du Khorasan, détournent l’attention de Hâroun ar-Rachîd.
  • Une paix temporaire : Hâroun accepte le tribut proposé par Nicéphore et signe une trêve. Un échange de prisonniers a lieu durant l’hiver sur la rivière Lamos.

La réponse de Nicéphore

Nicéphore profite du répit pour renforcer la défense de l’Empire :

  • Reconstruction des forteresses : Les remparts de Safsaf, Thebasa et Ancyre sont restaurés pour contrer les incursions futures.
  • Offensive byzantine : En 805, l’Empire lance son premier raid en Cilicie depuis deux décennies, capturant Mélitène et infligeant des pertes aux Arabes.

Conséquences à Long Terme

L’escalade des hostilités

La bataille de Krasos ouvre une période d’intensification des conflits :

  • Invasion massive en 806 : Hâroun mène une grande campagne pour rétablir la supériorité abbasside, contraignant Nicéphore à négocier.
  • Retour à l’équilibre : Malgré des concessions initiales, Nicéphore repousse une expédition en 807 et signe un traité de paix en 808, établissant une frontière inchangée.

Un équilibre stratégique

Malgré les lourdes pertes de Krasos, Nicéphore parvient à préserver l’intégrité territoriale byzantine :

  • Fin du tribut : Le traité de 808 marque la fin des paiements humiliants aux Abbassides.
  • Consolidation byzantine : Ces campagnes renforcent la résilience de l’Empire, posant les bases pour des initiatives militaires futures.

 

La bataille de Krasos illustre les défis constants auxquels Byzance est confrontée face au califat abbasside. Bien qu’une défaite coûteuse, cet affrontement souligne la détermination de Nicéphore à affirmer la souveraineté byzantine. Cette période de guerre intense marque un tournant, avec la fin des tributs et un retour à une politique militaire proactive.

  

Sources et Références :

  • Théophane le Confesseur, Chronique.
  • Al-Tabari, Histoire des prophètes et des rois.
  • Warren Treadgold, A History of the Byzantine State and Society.

Auteur : Stéphane Jeanneteau, février 2012.