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La bataille de Vézeronce (524) : Une lutte fratricide pour le contrôle du royaume burgonde.

La bataille de Vézeronce, survenue en 524, est un épisode sanglant des luttes entre Francs et Burgondes au VIe siècle. Ce conflit, marqué par des rivalités familiales et des ambitions territoriales, s’inscrit dans le contexte de l’effondrement progressif des royaumes burgondes face à l’expansion des Mérovingiens. La mort de Clodomir, roi franc, et les incertitudes entourant l’issue de la bataille en font un événement complexe, où se mêlent politique, tragédie familiale et enjeux militaires.


Contexte historique : tensions dynastiques et ambitions territoriales

Les origines du conflit

Le conflit trouve ses racines dans les relations tumultueuses entre les Francs et les Burgondes. Clotilde, épouse de Clovis et mère des rois francs Clodomir, Childebert, Clotaire et Thierry, est une princesse burgonde et la tante de Sigismond, roi des Burgondes. Cette alliance matrimoniale n’empêche pas les querelles familiales, exacerbées par des ambitions territoriales et des rivalités politiques.

En 523, les rois francs lancent une première expédition contre le royaume burgonde, capturent Sigismond et le font exécuter avec ses deux fils sur l’ordre de Clodomir. Godomar III, frère de Sigismond, prend alors la tête de la résistance burgonde et rassemble ses forces pour contrer l’avancée franque.

Les ambitions des rois francs

Après l’exécution de Sigismond, les rois francs, notamment Clodomir, visent à annexer le royaume burgonde. Cette campagne est également une entreprise de revanche familiale, Clotilde cherchant à venger la mort de ses proches causée par des luttes internes au sein de la dynastie burgonde.


La bataille : déroulement et enjeux militaires

La campagne de printemps 524

Au printemps 524, Clodomir reprend les hostilités en s’avançant sur Lyon, qu’il occupe sans résistance. Godomar, cherchant à préserver ses forces, se replie vers les Alpes, espérant peut-être obtenir un avantage stratégique ou un soutien extérieur.

La rencontre décisive a lieu près du village actuel de Vézeronce, dans une vaste plaine. Les forces franques, initialement supérieures en nombre et mieux organisées, repoussent les Burgondes et semblent proches de la victoire.

La mort de Clodomir

Le tournant de la bataille est marqué par une erreur tragique de Clodomir. Confondant un détachement burgonde avec des alliés, il se précipite imprudemment à leur rencontre et tombe dans une embuscade. Capturé, il est exécuté et sa tête, plantée sur une pique, est exhibée comme un trophée devant les lignes franques.

La mort de Clodomir sème le chaos dans les rangs francs. Certains récits, notamment celui de Grégoire de Tours, affirment que cette vision galvanise les troupes franques, qui reprennent le dessus et remportent la bataille. D’autres sources, comme Agathias, attribuent la victoire aux Burgondes, soulignant la maîtrise du terrain par Godomar à l’issue de la bataille.


Conséquences de la bataille

Une victoire incertaine

L’issue de la bataille reste débattue. Si les Burgondes conservent leur territoire et repoussent les Francs pour un temps, leur royaume sort affaibli de ce conflit. La mort de Clodomir marque également un coup dur pour les Francs, bien que ses frères, Childebert et Clotaire, finissent par se partager son royaume et consolider leur pouvoir.

La survie temporaire du royaume burgonde

Godomar III parvient à préserver l’indépendance du royaume burgonde pendant encore dix ans après la bataille. Cependant, cette résistance est de courte durée : en 534, les Francs achèvent leur conquête et intègrent le territoire burgonde dans leur royaume, mettant un terme définitif à cette entité politique.

Tragédie familiale et consolidation franque

Après la mort de Clodomir, ses frères assassinent ses deux fils pour s’assurer le contrôle de son héritage. Cet acte brutal illustre les luttes fratricides au sein de la dynastie mérovingienne, où les rivalités familiales et territoriales priment souvent sur les alliances de sang.


Analyse historique et stratégique

La bataille dans le contexte mérovingien

La bataille de Vézeronce reflète les ambitions expansionnistes des rois mérovingiens, prêts à exploiter les divisions internes de leurs voisins pour s’imposer comme la puissance dominante en Gaule. Toutefois, elle met également en lumière les failles dans leur coordination militaire et les conséquences tragiques de leur soif de pouvoir.

Un tournant dans les luttes entre Francs et Burgondes

Bien que les Burgondes résistent temporairement, la bataille de Vézeronce annonce leur déclin inévitable. L’intégration de leur royaume dans celui des Francs renforce la centralisation du pouvoir mérovingien et prépare le terrain pour l’unification de la Gaule sous une seule autorité.


Sources et références

  1. Grégoire de Tours, Histoire des Francs, Livre III.
  2. Agathias, Histoires.
  3. Marius d’Avenches, Chroniques.
  4. Rouche, Michel. Clovis. Éditions Fayard, 1996.
  5. James, Edward. The Franks. Blackwell, 1988.
  6. Encyclopédie Universalis, articles sur les Mérovingiens et les Burgondes.

Auteur : Stéphane Jeanneteau - Décembre 2011