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La Bataille du Mauropotamos (844) : Une Défaite Byzantine dans le Contexte des Guerres Arabo-Byzantines.

En 844, l’Empire byzantin subit une défaite importante contre les forces arabes lors de la bataille du Mauropotamos. Cette confrontation s’inscrit dans le cadre des affrontements continus entre Byzance et le califat abbasside, exacerbés par la nouvelle agressivité byzantine après la fin de la controverse iconoclaste en 843. Malgré une série de campagnes ambitieuses, les Byzantins subissent un revers notable, marquant une étape clé dans les guerres arabo-byzantines.


Contexte : La Relance des Conflits Arabo-Byzantins

La fin de l’iconoclasme et l’offensive byzantine

Après la restauration de la vénération des icônes en 843, l’impératrice-régente Théodora et le logothète Théoctiste adoptent une posture offensive contre les Arabes :

  • Objectif politique et religieux : Consolider l’unité interne de l’Empire et légitimer la nouvelle politique religieuse par des victoires militaires.
  • Expédition en Crète (843) : Malgré un début prometteur, cette tentative de reconquête de l’Émirat de Crète se termine par une défaite en l’absence de Théoctiste.

Les incursions arabes

Face à l’agressivité byzantine, les Arabes lancent une invasion en Asie Mineure, probablement menée par Umar al-Aqta, émir de Malatya, et soutenue par d’autres émirats frontaliers tels que Qaliqala et Tarse. Les forces arabes pillent plusieurs thèmes byzantins, atteignant même Dorylée et les environs du Bosphore.


Déroulement de la Bataille

L’invasion arabe

Les forces arabes pénètrent profondément en territoire byzantin, unifiant leurs troupes à Ardandun (peut-être Rhodandos). Cette coalition mène des raids destructeurs en Cappadoce, dans les thèmes des Anatoliques, des Bucellaires et de l’Opsikion.

La bataille au Mauropotamos

Théoctiste rassemble une armée pour intercepter les envahisseurs :

  • Lieu de la bataille : La localisation exacte du Mauropotamos reste incertaine, mais il pourrait s’agir d’un affluent du Sangarios en Bithynie ou de l’Halys en Cappadoce.
  • Une défaite byzantine : Les Byzantins subissent de lourdes pertes, et plusieurs officiers importants font défection pour rejoindre les Arabes.

Conséquences immédiates

Repli de Théoctiste

Après la défaite, Théoctiste retourne précipitamment à Constantinople :

  • Instabilité interne : Il accuse Bardas, le frère de Théodora, de trahison et l’exile, intensifiant les divisions au sein de la cour impériale.

Pillage arabe

Les forces arabes exploitent leur victoire en poursuivant leurs raids, atteignant Dorylée et causant des destructions significatives. Cependant, elles ne parviennent pas à maintenir leur pression à cause des troubles internes au califat.


Conséquences à long terme

Trêve et échanges diplomatiques

En 845, les deux empires conviennent d’une trêve et d’un échange de prisonniers, scellant temporairement la paix :

  • Échange de captifs : L’accord est concrétisé le 16 septembre 845 sur la rivière Lamos.
  • Accalmie sur la frontière : La frontière byzantino-arabe connaît une relative stabilité pendant les six années suivantes.

Priorité byzantine sur la Sicile

Byzance détourne son attention vers la Méditerranée, cherchant à contrer la conquête de la Sicile par les Aghlabides. Cela marque un changement temporaire dans la stratégie militaire byzantine.

Fragilité interne de l’Empire byzantin

La défaite du Mauropotamos met en évidence des divisions internes :

  • Défections militaires : Les défections d’officiers pendant la bataille illustrent des tensions au sein de l’armée.
  • Fragilité du leadership : Les luttes politiques entre Théoctiste et Bardas affaiblissent la cohésion impériale.


La bataille du Mauropotamos est un revers significatif pour l’Empire byzantin, malgré des ambitions renouvelées après la restauration de la vénération des icônes. Bien qu’elle ait entraîné des pertes lourdes, cette défaite n’a pas eu de conséquences stratégiques durables en raison des troubles internes du califat abbasside. Elle marque néanmoins une phase de transition dans les guerres arabo-byzantines, alors que Byzance commence à réorienter son attention vers la Méditerranée.

 

Sources et Références :

  • Théophane Continué, Chronique.
  • John Haldon, The Byzantine Wars.
  • Alexander Vasiliev, Byzantium and the Arabs.

Auteur : Stéphane Jeanneteau, février 2012.