L’époque classique, considérée comme l’âge d’or de la civilisation grecque (V e siècle-IV e siècle), va réunir toutes ses histoires particulières en un destin commun. Les historiens affirment que l’âge archaïque a duré de -750 à -480, période pendant laquelle les cités-États se sont constituées, en même temps que les Grecs s’établissaient autour de la Méditerranée. Ce fut une époque de renaissance culturelle et politique. De riches exemples d’art, d’architecture et de littérature illustrent cette brillante période.
Mais soudain, tout sembla changer, et la civilisation grecque se trouva menacée d’extinction: une nouvelle puissance venue d’Orient s’apprêtait à envahir les cités-États.
En 546, le roi de Perse Cyrius II conquit le royaume de Lydie, en Asie Mineure, pour créer un Empire perse qui s’étendait de la mer Égée à l’océan Indien. Puis, il se retourna contre les cités grecques ioniennes de la côte occidentale de l’Asie Mineure. Les Athéniens vinrent soutenir leurs compatriotes, mais la poussée perse fut impossible à arrêter et, en 510, les cités et les îles ioniennes étaient tombées entre les mains de leurs envahisseurs.
Darius décida de s’occuper de ces Grecs qu’il trouvait embarrassants. Il gagna l’Europe en traversant le Bosphore et marcha sur la Grèce à travers la Thrace et la Macédoine, qu’il écrasa. Avec l’aide des Athéniens, la cité ionienne de Milet se souleva, ce qui ralentit temporairement l’invasion de la Thessalie, qui cependant succomba à l’avancé perse en 494.
Darius projetait d’anéantir Athènes pour éviter une nouvelle intervention. Le décor des guerres médiques était en place: une série de campagnes allait opposer Athènes et une poignée d’alliés à la puissance de l’Empire perse. Des ambassadeurs perses demandèrent que les Athéniens envoient au roi de Perse de la terre et de l’eau, symbole de soumission. Une fois la requête rejetée, la guerre paraissait inévitable.
Darius pensa tout d’abord n’engager qu’une expédition punitive pour forcer Athènes à se soumettre. Après avoir perdu une flotte, en 492, dans une tempête au large des côtes de la Chacidique, non loin du mont Athos, le roi de Perse réunit une autre flotte et une autre armée, tandis qu’Athènes se démenait pour trouver des alliés, car les anciennes inimitiés entre Athènes et Sparte empêchaient une franche coopération. Athènes se retrouvait donc pratiquement seule face aux Perses.
Lorsque les Perses se lancèrent contre Athènes en 490, elle se trouvait donc complètement isolée. Il s’ensuivit pendant onze années un combat qui relève de la lutte entre David et Goliath, entre la civilisation grecque et les potentats orientaux de Perse et de Médie. L’ironie veut que les Perses ont réussi l’impossible: unifier les Grecs contre un ennemi commun - les Spartiates, les Thébains et les Athéniens se liguèrent, oubliant leurs rivalités, dans un combat pour leur survie.
La menace perse
Alors que la Grèce sortait des siècles obscurs, à l’est, l’empire assyrien atteignait l’apogée de sa puissance. Bien qu’ayant prospéré sous le règne du roi Assurbanipal (668-627), l’empire se désintégra après sa mort. Les territoires assyriens furent divisés entre les Mèdes et les Babyloniens . Sous le règne du roi Cyaxare (vers 625-585), l’empire mède devint la puissance dominante du Moyen-Orient, s’étendant de l’Iran à l’Anatolie.
En 550, les Perses, sous la conduite de Cyrus le Grand, se révoltèrent contre leurs seigneurs mèdes, conquirent l’empire et assimilèrent l’aristocratie mède et le gouvernement à un nouvel état perse. L’empire perse achéménide, portant le nom du fondateur de la dynastie royale perse, fut gouverné par Cyrus (régnant sous le nom de Cyrus II de 559 à 530). Il étendit son territoire en conquérant la Lydie (Asie Mineure) en 546, la Babylonie (la plus grande partie du Moyen-Orient) en 539, puis la Bactriane (au nord de l’Iran) et le Gandhara (aujourd’hui l’Aghanistan), Au début du ve siècle, l’empire de Cyrus s’étendait des rivages de la mer Égée à l’Himalaya, et de la mer Caspienne à la mer Rouge.
Si la conquête de la dynastie lydienne des Mermnades en Asie Mineure fut relativement simple, elle mit les Perses en contact avec les colonies grecques de la côte sud de la mer Noire. Leurs troupes s’arrêtèrent devant les cités-États grecques d’Ionie sur la côte égéenne de l’Asie Mineure, et leur flotte menaça les îles ioniennes proches.
De grandes cités comme Milet, Halicarnasse et Éphèse tombèrent les unes après les autres. Les Ioniens avaient appelé à leur secours les Grecs du continent, mais malgré la présence des navires et des hoplites d’Athènes et d’Eubée, l’avancée des Perses continua. Après ses conquêtes égéennes, Cyrus se tourna vers l’est, et entra à Babylone à la tête de son armée en 539.
La plus puissante des armées
Cyrus passa les huit dernières années de sa vie à organiser son empire hétérogène, qu’il divisa en vingt provinces. Chacune d’elles était dirigée par un satrape, Gouverneur régional qui agissait comme chef militaire et administrateur. Cyrus dirigeait son empire de son palais de Pasargades, ville qu’il fonda en 540 et qui resta la capitale de l’empire jusqu’en 522, date à laquelle son fils Cambyse la déplaça près de Persépolis.
En 512, le successeur de Cambyse, Darius Le Grand (521-486), envahit la Thrace en passant d’Asie en Europe sur un pont de bateaux conçu par un ingénieur grec ionien, Mandrocle d’Athènes. Darius fit campagne contre les Scvthes au-delà du Danube, puis se retourna contre la Macédoine qui se soumit à la suzeraineté perse.
Alors que Darius se battait contre les rébellions des Grecs d’Asie Mineure, son beau fils .Mardonios tenta d’attaquer le sud de la Grèce continentale, mais sa flotte fut détruite par une tempère. Darius concentra ses forces en Asie mineure et se prépara à lancer une campagne navale punitive contre Athènes et ses alliés en 490.
Mais le Grand Roi disposait d’immenses ressources et l’apparence hétérogène de son armée était trompeuse. Elle était, en effet, commandée par un état-major efficace, soutenu par une excellente logistique. Menée par les Immortels - la garde perse - l’armée était formée de trente corps, chacun venant d’une région différente de l’empire. Elle comprenait les cavaleries des Parthes et des Mèdes, les porteurs de fronde cypriotes, les archers indiens, les lanciers d’Iran et de Bactriane et les voltigeurs lybiens.
Bien que la nature polyglotte de l’armée perse ait posé quelques problèmes de commandement et de communications, son importance était impressionnante. Darius disposait de 150 000 hommes et de 650 navires. Même unis, les Grecs disposaient de cinq fois moins d’hommes et de deux tiers moins de bateaux. Confrontés à une telle menace, les Grecs ne parvinrent pas à réunir leurs forces.
Marathon
En -490 Darius lança une flotte de 600 navires en mer Egée, et s’empara de chaque île qu’il rencontrait. Finalement les Perses débarquèrent en Attique, où ils se heurterent à une armée athénienne et livrèrent la première bataille des guerres médiques.
Cette force se dirigea vers le sud-ouest à travers les Cyclades pour atteindre Naxos où tous les bâtiments furent détruits. Au nord-ouest, les habitants de Délos s’enfuirent avant l’arrivée des envahisseurs, mais Datis leur envoya un message de paix. Il prétexta que Naxos était une alliée d’Athènes, alors que Délos était restée neutre. Après avoir apaisé les habitants de l’île par des offrandes au temple d’Apollon à Délos, les Perses continuèrent vers Eubée, au nord d’Athènes, prenant des otages dans chacune des îles où ils passaient.
Sur Eubée, la petite cité de Karystos refusa de se soumettre. Elle fut assiégée et ses bâtiments publics incendiés. Les Perses avancèrent alors vers Érétrie, qui refusa elle aussi de se rendre. Elle résista une semaine avant qu’un traître ne se laisse corrompre et ouvre les portes de la cité. Une fois encore, les Perses détruisirent les temples et les édifices publics et réduisirent la population en esclavage.
Pour éviter toute résistance des Athéniens, Hippias conseilla aux Perses de débarquer assez loin d’Athènes sur la côte nord-ouest de l’Attique, à Marathon, dont l’immense baie pouvait accueillir toute la flotte perse. La plaine de l’arrière-pays permettrait aussi à la cavalerie perse d’opérer sans obstacle pour affronter en terrain ouvert la cavalerie athénienne. On espérait que des sympathisants, achetés par l’or des Perses, trahiraient Athènes. C’est pourquoi Datis et Artaphernès attendirent dans leur camp une insurrection, qui ne vint jamais. Chaque jour qui passait donnait aux Athéniens le temps de réunir leurs forces et celles de leurs alliés. Les 10 000 hoplites d’Athènes qui observaient les Perses du haut des collines dominant la plaine de Marathon envoyèrent des messages aux autres États pour demander leur aide.
Sparte refusa de venir avant le mois d’août, sous le prétexte d’une fête religieuse. En fait, les Spartiates voulaient gagner du temps pour voir comment évoluerait la situation. Malgré l’arrivée d’une centaine de volontaires envoyés par Platées, les Athéniens se retrouvaient seuls. Le polémarque Callimaque conduisait l’armée, tandis que le remarquable Miltiade coordonnait la stratégie.
Avant que les Spartiates changent d’avis et viennent apporter leur soutien aux Athéniens, Datis et Artaphernès décidèrent de passer à l’action. Hippias prit contact avec certains de ses partisans à Athènes, qui lui proposèrent de trahir Athènes à l’arrivée des Perses. Un plan fut dressé qui prévoyait de clouer sur place les Athéniens à Marathon, tandis que le gros de l’armée perse contournerait l’Attique par la mer pour s’emparer d’Athènes, alors pratiquement sans défense.
Des espions avertirent Miltiade que Datis, profitant de l’obscurité, débarquait une grande partie de sa cavalerie et une importante division d’infanterie. Les Athéniens décidèrent de frapper alors que l’ennemi était encore divisé, espérant battre Artaphernès dans la plaine avant de retourner à Athènes pour intercepter Datis. L:attaque, menée par les forces athéniennes oncentrées sur leurs ailes, prit les Perses par surprise. Les flancs perses lâchèrent prise et les hommes d’Artaphernès durent battre en retraite vers la mer. Les Athéniens se précipitèrent sur le camp ennemi pour tenter d’empêcher la flotte perse de venir à la rescousse. Dans une courte et sanglante bataille, 6400 Perses perdirent la vie dans les marais et sur les plages, tandis que les Athéniens ne perdaient que 192 hommes.
Les Athéniens se replièrent sur Athènes pour empêcher Datis de débarquer. Comprenant que la campagne était perdue, celui-ci préféra récupérer les survivants, parmi lesquels Artaphernès, et repartir vers l’Asie. Athènes était temporairement sauvée. Au prochain retour des Perses, il ne s’agira plus d’une simple expédition punitive, mais d’une invasion de grande envergure.
Les Thermopyles
À sa mort en -486, le roi Darius avait prévu d’envahir la grèce par le nord. Son fils Xerxès (486-465) releva le défi, mais fut retardé par des événements survenus en Egypte. Pendant l’hiver 481-480, il était enfin prêt.
Xerxès rassembla à Sardes, au nord-ouest de l’Asie Mineure, une armée d’environ 200 000 hommes galvanisés par l’unité d’élite que formaient les 10 000 Immortels. Les chroniqueurs grecs affirmèrent plus tard que l’armée de Xerxès était si nombreuse que ses hommes pouvaient « assécher une rivière en la buvant.»
Comme l’armée de Darius avant elle, les Perses passèrent en Thrace sur un pont de bateaux jetés à travers l’Hellespont, et furent escortés par une flotte assurant leur approvisionnement. Voulant éviter de perdre à nouveau ses navires dans une tempête au large du mont Athos, Xerès ordonna de creuser un canal à travers Actium, langue de terre qui conduit à ce cap battu par les vents.
La réaction des Grecs face à cette nouvelle invasion fut mitigée. Quelques États du Nord ouvrirent leurs frontières aux Perses et, se déclarèrent neutres et, tandis que les Grecs se disputaient, les Perses avançaient. Le roi Léonidas de Sparte fut choisi comme chef de la coalition qui devait affronter les envahisseurs, mais sa participation éveilla l’hostilité de plusieurs autres cités-États.
Une force réunissant seulement 5 000 Grecs marcha vers le nord à travers la Thessalie, espérant arrêter les Perses dans les cols thessaliens. Mais il était trop tard, et ils durent battre en retraite vers le sud. Léonidas choisit d’arrêter les Perses au défilé des Thermopyles, considéré comme la porte de la Grèce centrale, passage étroit entre le golfe Maliaque et les monts Locriens. À la mi-août, l’armée de Xerxès atteignit la passe, mais la flotte fut incapable de la rejoindre en raison des navires athéniens qui gardaient l’entrée nord du golfe. Incapable d’utiliser ses navires pour contourner les Grecs, Xerxès n’avait d’autre choix que d’attaquer.
Alors que les deux flottes s’affrontaient en une série de combats incertains au large d’Artémision, sur la côte nord d’Eubée, Xerxès lança deux attaques frontales pendant deux jours, utilisant d’abord les vétérans de ses troupes mèdes, puis un corps de volontaires. Les Perses ne purent chasser leurs adversaires de leur position, parce que l’étroitesse du défilé des Thermopyles ne leur permettait pas de déployer l’ensemble de leurs forces: leur attaque échoua.
Ultime position des Spartiates
Les Grecs avaient démontré qu’ils étaient mieux armés, mieux entraînés et mieux équipés. Le choc de l’attaque des Perses se brisa sur un contingent d’élite de 300 soldats spartiates, les troupes les plus aguerries de toutes les forces grecques.
Xerxès fit une autre tentative infructueuse pour déloger les défenseurs, et ses pertes augmentèrent. Pendant ce temps, une sévère tempête avait réduit sa flotte à environ un tiers des 700 navires qui la constituaient. Ne sachant pas comment sortir de l’impasse, Xerxès saisit l’opportunité que lui offrit un informateur local nommé Éphialte, qui s’introduisit dans le camp perse et affirma qu’il pouvait montrer aux envahisseurs une route leur permettant de contourner les Thermopyles. Xerxès envoya le général Hydarnès à la tête de 10 000 hommes pour suivre la route indiquée par Éphialte.
Une force d’interception grecque fut balayée, mais l’alarme put être donnée, et la majorité réussit à échapper au piège. Léonidas et ses 300 Spartiates choisirent de tenir leur position pour donner à leurs alliés le temps de s’enfuir. N’ayant plus aucun espoir de secours, les défenseurs périrent dans un dernier assaut. Cette action évita aux survivants de l’armée grecque d’être poursuivis par la cavalerie perse.
Xerxès avait réussi à s’enfoncer dans les riches terres de la Grèce, mais au prix de lourdes pertes, en hommes et en temps. Si le sacrifice des Spartiates permit à leurs alliés de s’échapper, il redonna aussi du courage à la confédération grecque affaiblie. Bien que l’avance perse continuât, les Grecs refusaient toujours les demandes de Xerxès. L’honneur de Léonidas et de ses Spartiates devait être vengé.
A la fin de l’été 480, Xerxès et son armée de près de 200 000 hommes avançaient au cœur de la Grèce continentale, conquérant tout sur leur passage. Thèbes se rendit, offrant « la terre et l’eau », puis Delphes, Élatée, et d’autres cités béotiennes plus petites, jusqu’à ce que les Perses arrivent à Athènes, en septembre.
La flotte de guerre athénienne était en mer, entre le port du Pirée et l’île de Salamine, un peu plus au sud. La plus grande partie de l’armée athénienne battait en retraite vers l’ouest pour rejoindre ce qui restait des forces de la coalition, repliées sur l’isthme de Corinthe. Une petite unité d’hoplites était restée en arrière pour défendre l’Acropole, le cœur sacré et politique d’Athènes. La cité fut abandonnée aux Perses.
Ils assiégèrent rapidement l’Acropole, dont peu après, les défenseurs étaient massacrés. Les temples de la cité furent pillés et incendiés, et les .Athéniens réfugiés sur leur île assistèrent à la destruction de leur ville.
La flotte grecque, en majorité athénienne, accueillait des escadres d’autres cités-États, réunissant ainsi de 350 à 380 trirèmes. Pour sa part, la flotte perse en avait environ 500, principalement égyptiennes, ioniennes et phéniciennes. Elle était ancrée à l’ouest et attendait les ordres. Au moyen de diverses ruses, Thémistocle essaya de pousser les Perses à la bataille, car seule une victoire décisive pouvait retourner la situation. Xerxès pensait qu’en détruisant la flotte grecque, il pourrait contourner Corinthe et conquérir Sparte.
Une mer couverte d’ épaves
Le roi de Perse donna l’ordre d’attaquer et fit porter son trône sur le rivage pour observer le spectacle. Avant de lancer leur assaut, les Perses occupèrent l’île de Psyttalie, qui séparait les deux flottes, pour pouvoir protéger les marins alliés et tuer les ennemis. Les Grecs s’étaient retirés, engageant le gros de leur flotte dans le canal de Salamine. Ils avaient laissé une petite escadre dans la baie d’Ambelaki, au sud, d’où ils pourraient effectuer des sorties contre l’arrière de l’ennemi.
Comme aux Thermopyles, le dispositif grec ne laissait aux Perses aucune chance de déployer leur supériorité numérique. Xerxès, l’armée perse située au nord de l’Attique et le peuple athénien au sud de l’île de Salamine assistèrent tous à une brutale confrontation. Les Grecs manœuvrèrent pour former une ligne de front, tandis que la flotte perse, trop nombreuse, s’empêtrait dans une mer dont elle ne connaissait ni les courants ni les vents. Les Grecs, à maintes reprises, éperonnèrent les navires perses sans défense, ajoutant encore à la débâcle.
La bataille tourna lentement en faveur des Grecs. De nombreuses trirèmes perses tentèrent de s’échapper, mais elles tombèrent sur l’escadre cachée dans la baie d’Ambelaki. Les Athéniens reprirent l’île de Psyttalie et massacrèrent la garnison perse. Le massacre continua autant sur la mer que sur la terre, et la flotte perse se trouva prise au piège.
La bataille finale eut lieu au pied du mont Aigaléos d’où Xerxès assistait à la destruction de sa flotte. Comme l’écrivit un témoin, Eschyle: «Les coques écrasées et retournées sur la mer étaient si nombreuses qu’on ne pouvait plus voir l’eau, où s’entrechoquaient les épaves et les hommes massacrés, et les rivages comme les récifs se couvraient de corps sans vie. » La guerre n’était pas gagnée, mais les Perses avaient subi une cuisante défaite. Ils se retirèrent vers le nord, laissant les ruines d’Athènes à ses citoyens. La flotte perse était détruite, mais son armée était intacte, et elle reviendrait.
Platées
Pendant l’hiver 480-479, les Grecs dressèrent des plans pour contrer la nouvelle invasion perse. Sparte et ses alliés du Péloponnèse prétendaient que, depuis l’anéantissement de la flotte perse, ils étaient en mesure de bloquer l’isthme de Corinthe. De leur côté, Athènes et les cités-États du centre de la Grèce qui avaient déjà été envahies insistaient sur la défense de leurs cités.
Le commandant perse Mardonios, lui, essayait d’isoler Athènes en proposant paix et traités. Si la flotte athénienne était neutralisée, Mardonios pourrait déclarer la guerre à Sparte. Les Athéniens refusaient tout compromis. Comme prévu, lorsque le printemps arriva, une armée perse se mit en marche vers le sud, traversa la Thessalie et la Béotie et entra en Attique. Une fois encore, les Athéniens trouvèrent refuge sur l’île de Salamine, et Athènes fut incendiée.
Sparte accepta finalement de coopérer, et une armée grecque composite marcha sur Mégare à partir de l’isthme de Corinthe, forçant les Perses à se retirer d’Athènes vers leurs lignes de ravitaillement du nord-ouest. Le terrain de la campagne de Béotie, au sud de Thèbes, sans obstacles et plat, était bien adapté à une attaque de la cavalerie, et Mardonios espérait y attirer les Grecs. Alors que les Perses se préparaient à la bataille près de la ville de Platées, les Grecs, sous le commandement du roi de Sparte Pausanias, descendirent des montagnes et établirent leurs campements au pied des collines, au sud de leurs ennemis.
L’estimation de la taille des deux armées en présence varie, mais il est probable que les Perses disposaient de 50 000 hommes alors que les Grecs n’en avaient que 35 000. Les hoplites étaient de remarquables fantassins, lourdement armés, mais les Perses et leurs alliés, les Grecs du Nord, étaient aussi réputés pour leurs patrouilles et leur cavalerie. Chacune des parties en présence avait ses avantages et ses inconvénients.
L’arrnée grecque était constituée de Spartiates, d’Athéniens, de Corinthiens, de Mégariens, auxquels venaient s’ajouter des contingents fournis par vingt plus petites cités-États. Les Perses, chez qui se retrouvaient les Mèdes, les Bactriens et les Indiens, étaient soutenus par 15 000 à 20 0000 alliés grecs recrutés en Béotie, Thessalie, Macédoine, Locride et Phocide, États de la Grèce du Nord ou du Centre. Ce n’était donc pas une bataille entre les Grecs et les Perses qui se préparait, mais une lutte entre deux idéologies, l’une impériale et l’autre fédérale.
Bataille de Salamine |
Les Perses recherchaient un bon terrain pour leur cavalerie et les Grecs un bon champ d’action pour leur infanterie. Celui qui lancerait l’attaque aurait l’avantage du choix du lieu. Mardonios effectua le premier mouvement, se servant de sa cavalerie pour harceler les Grecs dans les contreforts du Kithaireon _ aujourd’hui mont Asopus - espérant les attirer dans la plaine. Les Grecs, affaiblis, maintinrent quand même leurs positions. Pendant ce temps, les Perses isolaient et détruisaient un convoi d’approvisionnement.
Pausanias avait été troublé quand des éclaireurs de la cavalerie perse s’étaient avancés derrière lui. Ce fut un débat autant psychologique que militaire, et le Spartiate refusa de quitter sa position. Ayant coupé la ligne d’approvisionnement, Mardonios pensait que les Grecs se retireraient, ce que Pausanias avait deviné. Il organisa donc un repli à travers les montagnes, mais laissa en place les forces athéniennes et spartiates qui formaient ses ailes.
Cette ruse, couronnée de succès, força Mardonios à un engagement général contre la ligne de front grecque. Les Perses durent se battre contre les Spartiates et les Grecs du Centre, pendant que ses alliés grecs attaquaient les Athéniens. La ligne de front étroite força une fois encore les Perses à se battre en petites formations, et quand Mardonios tomba à la tête de sa cavalerie, son flanc gauche s’écroula, suivi du reste de son armée. Seuls restèrent les Béotiens et les 300 hoplites de leur bataillon sacré qui tombèrent sous les coups de leurs vieux ennemis, les Athéniens. La cavalerie perse évita le désastre, et les Perses se retirèrent à la tombée de la nuit.
Les Thermopyles étaient vengés, et les Perses ne tenteraient plus d’envahir la Grèce. Le théâtre des combats se fixa en Asie Mineure jusqu’à ce qu’une paix soit signée en 449. Si les Grecs s’étaient montrés unis, ils s’étaient aussi battus entre eux. Au cours des décennies qui suivirent, cette rivalité fratricide conduira à la guerre entre les deux grandes puissances du monde grec.
Lorsque Athènes sortit des guerres médiques en 480-479, elle était la plus grande puissance du monde grec. Même si la cité était alors en cendres, les Athéniens étaient considérés (ou ils réussirent à se faire considérer) comme les chefs de la coalition grecque contre les Perses. Tant que se maintint la menace d’une nouvelle invasion, cette suprématie permit à Athènes de poursuivre ses ambitions impérialistes. Son arrogance favorisa la croissance de son inimitié avec Sparte et ses alliés du Péloponnèse, mais Athènes ignora ses voisins et continua à étendre ses frontières politiques et économiques pour former un empire s’étendant sur la plus grande partie du bassin égéen.
Durant le Vème siècle, Athènes fut reconstruite, surtout financée par ses nouveaux alliés. Les édifices publics de l’époque sont sans doute les plus belles réalisations de la Grèce. Ces expressions concrètes de puissance s’accompagnaient de démonstrations tout aussi spectaculaires. Pendant plus d’un siècle, Athènes fut le centre culturel, politique et artistique du monde grec, et les commerçants de la cité se montraient tout autant aventureux que les responsables civiques .
Mais les Athéniens durent lutter pour y parvenir. Les militaires athéniens, victorieux des Perses, avaient maintenant besoin de se réformer. Ils avaient échangé leur rôle de défenseurs locaux pour devenir une force considérable, qui dominait les mers et les cités de garnison, allait même jusqu’à lancer des expéditions punitives loin de ses bases. Si la cité s’était protégée par de nouveaux remparts, le véritable gardien de la sécurité était la flotte, témoin de l’importance du commerce maritime athénien.
Thémistocle conduisit une nouvelle politique intérieure et extérieure qui plaçait Athènes au cœur d’un empire marchand maritime, et faisant passer d’entité régionale, la polis devint un super-État. Malgré ces réussites, beaucoup de citésÉtats se méfiaient d’Athènes et de son gouvernement démocratique, mais d’autres États admiraient et enviaient sa prospérité. Sparte prit la tête des opposants; les deux puissances réunirent autour d’elles des alliés et formèrent des blocs défensifs. Le risque de guerre entre les États augmenta. Lorsque le conflit survint, il mit à l’épreuve toutes les forces d’Athènes, tant humaines que matérielles.
La formation de la ligue de Délos en 477, destinée à unifier toutes les puissances navales de la mer Égée, donna le contrôle effectif des mers à Athènes. Sa flotte était la plus grande de la mer Égée et était assez puissante pour inquiéter les Phéniciens qui, avant les guerres médiques, contrôlaient la Méditerranée orientale jusqu’à Carthage. Par comparaison, Chalcis, sur l’île d’Eubée, ne possédait que 20 trirèmes, et Égine n’en rassemblait que 30. Des États et des îles plus petits firent une contribution de quelques navires.
Cette suprématie navale sur ses alliés signifiait qu’Athènes gouvernait de fait la ligue, puisque sa flotte servait d’arbitre à sa politique. Pendant les années 460, l’expansion était à son comble. Pour les jeunes Athéniens, servir dans les galères était considéré comme un honneur. En 420, les Athéniens avaient plus de 350 trirèmes, une flotte qui écrasait celle de Sparte (qui n’avait jamais eu jusqu’alors de grands navigateurs) et de ses alliés du Péloponnèse. Sur terre, toutefois, les choses étaient différentes Sparte était de loin la cité la plus dominante.
Dans l’éventualité d’une guerre, le déséquilibre stratégique entre les forces terrestres et maritimes portait en lui-même les racines d’un conflit de longue durée, car aucun des deux protagonistes n’était capable de porter le coup décisif. On constatera toute l’ampleur de ce problème pendant la guerre du Péloponnèse.
Au cours des deux décennies qui suivirent les guerres médiques, Athènes renforça sa flotte, puis força ses alliés à rejoindre la coalition égéenne. Privés de leur autodétermination, les alliés étaient réduits, dans le nouvel «empire démocratique », à l’état de provinces assujetties
La détàite des Perses en Grèce continentale et en Thrace n’avait pas écarté la menace, surtout sur les îles grecques de la mer Égée et sur la côte ionienne. La constitution d’une alliance défensive était indispensable pour contrer une nouvelle attaque perse. Athènes était le principal promoteur de cette initiative: parce qu’elle avait une considérable force navale, mais aussi parce que les autres États ioniens voulaient copier son gouvernement démocratique et sa culture
En 477, quatre ans après l’échec de l’invasion perse. Les politiciens et les commandants athéniens rencontrèrent leurs homologues des colonies d’outre-mer, des cités ioniennes et des îles de la mer Égée lors d’un grand rassemblement organisé sur l’île de Délos, île dédiée à Apollon.
Il en résulta la formation de la ligue de Délos, une alliance des cités-États égéennes qui comprenait les cités de la côte ionienne d’Asie Mineure, les îles du centre et du nord de la mer Égée, la bande côtière de Chalcidique, la Thrace et les côtes asiatiques de la mer de Marmara. Les autres dirigeants de la ligue étaient Rhodes, Milet, Naxos, Samos, Mytilène, la Chersonèse, Eubée, la Béotie, la Locride et la Phocide. Si les membres avaient une politique militaire commune, il était évident que c’était Athènes qui la dirigeait. La guerre contre les Perses continua, avec des campagnes secondaires en Asie, à Chypre et en Égypte.
Grâce au développement important de sa marine, Athènes commença à dominer tout à fait la ligue de Délos. Des campagnes militaires et navales étendirent et sécurisèrent ses frontières, ce qui renforça encore davantage la suprématie athénienne. Cimon s’empara de la cité d’Éion tenue par les Perses, en 475, mettant ainsi la totalité de la côte de Chalcidique sous l’hégémonie de la ligue.
Deux ans plus tard, il détruisit la base des pirates de l’île de Skyros, ce qui lui donnait le contrôle total de la mer Égée, destiné à sécuriser le trafic des navires marchands athéniens entre Athènes, la Thrace, la mer Noire et le nord-est de l’Asie Mineure. Finalement, les Athéniens conquirent les dernières cités encore aux mains des Perses sur les côtes asiatiques de la mer Égée lors d’une campagne qui culmina avec la victoire de l’Eurymédon (468).
Une fois sa sécurité assurée, l’arrogante Athènes n’eut plus de limites et ses alliés furent traités comme des sujets. Quand Naxos choisit de se retirer de la ligue en 470, une flotte fut dépêchée pour la contraindre à revenir sur sa décision. D’autres tentatives d’abandon furent considérées comme des rébellions, et traitées comme telles. Mais la menace perse se faisant moins prégnante, les charges financières imposées par Athènes devinrent injustifiables aux yeux de ses alliés.
Athènes préféra ignorer tout mécontentement qu’elle suscitait. En 447, la Béotie quitta la ligue, puis ce fut le tour de la Phocide et de la Locride. Mégare et Eubée se soulevèrent avec l’aide de Sparte. On peut dire que son arrogance fut une grave erreur. et coûta cher à Athènes, car elle entraîna le monde grec dans une guerre devenue inévitable.
L’alliance défensive qui s’était formée contre la Perse dans le passé - d’où la fondation de la ligue - semblait s’être évanouie après la signature du traité de paix entre la Grèce et la Perse par Périclès en 449, mais le boulé et le démos athénien avaient l’intention de conserver ce qui était devenu leur propre empire. Le paiement de tributs à Athènes en monnaie athénienne ne servait plus à se protéger, mais à glorifier la cité de Périclès.
Sous la conduite de Périclès, l’Athènes du milieu du Vème siècle avait connu un âge d’or, ce qui n’avait pas été le cas des alliés. Périclès était un grand orateur, et il fut le premier homme d’État et chef de la démocratie j à partir de 460, il parla avec éloquence de démocratie, de liberté et de l’efficacité d’un gouvernement ouvert à tous d’Athènes, ce qui faisait de lui le premier avocat de l’impérialisme.
La guerre menaçait dans la Grèce antique. Athènes disposait d’une puissante force navale et avait constitué la riche ligue de Délos. De son côté, Sparte avait réuni la ligue du Péloponnèse, mais ce n’était encore qu’une puissance militaire régionale, dont les ressources financières n’égalaient pas celles de la ligue de Délos. Au cours des années 460, Sparte se préoccupait de gérer ses propres affaires, notamment la révolte des hilotes. La guerre éclata lorsque Mégare quitta la ligue du Péloponnèse pour s’allier à Athènes, en 460.
La première guerre du Péloponnèse dura neuf ans, durant lesquels les Athéniens dominèrent la Grèce centrale en fortifiant Corinthe et son isthme. Mais la perte d’une armée athénienne en Égypte, alors aux mains des Perses en 454, provoqua une rébellion dans le royaume d’Athènes, rébellion qui contraint la cité à négocier. Athènes et Sparte acceptèrent un arrêt des hostilités en 451. Puis, deux ans plus tard, la Perse signa avec Athènes. On pensait que la Grèce avait réussi à éviter un nouveau conflit.
Mais l’attitude arrogante d’Athènes vis-à-vis de ses alliés conduisit la Béotie et la Locride à se retirer de la ligue. Sparte prit la direction du nord pour se joindre au conflit, forçant Mégare à changer de camp et les Athéniens à signer un autre traité de paix. À cette époque, Sparte était considérée comme la puissance dominante de la Grèce centrale. Les deux adversaires savaient que la paix ne pouvait être que temporaire, et chacun d’eux se préparait pour une grande guerre.
Athènes s’assura de la loyauté de ses alliés dans la ligue de Délos en écrasant toutes révoltes. Un conflit avec Corinthe conduisit les Athéniens à aider la colonie corinthienne rebelle de Corcyre et, en 431, ils assiégèrent Potidée, colonie corinthienne de Chalcidique (bien que membre de la ligue de Délos et donc, théoriquement, alliée des Athéniens). Sparte décida alors d’invoquer son traité avec Corinthe pour déclarer la guerre à Athènes. La seconde guerre du Péloponnèse qui sera beaucoup plus dévastatrice que la première avait commencé.
Sparte dominait sur terre et Athènes sur mer. Il s’agissait d’un conflit équilibré, dans lequel aucun des adversaires n’était capable de porter un coup décisif à l’autre. Cette situation força les deux ennemis à adopter des stratégies radicales pour vaincre. La seconde guerre du Péloponnèse est historiquement divisée en trois phases: la guerre archidamienne (431-421), l’expédition de Sicile ou la phase d’Alcibiade (420-413) et la guerre ionienne (412-404). Pendant ces étapes, la guerre qui s’étendit à travers le monde grec provoqua d’énormes pertes en vies humaines et en richesses. Dans son sillage, elIe apporta aussi épidémies, dévastations et famines au cœur de la Grèce continentale et de la Sicile.
Finalement, les seuls vainqueurs, dans ce conflit fraticide, furent les États restés neutres. Les cités- États grecques affaiblies à l’issue de cette guerre étaient mal préparées pour s’opposer à l’invasion de la Macédoine, l’étoile montante aux frontières du Nord du monde grec.
Archidamos avait mis au point une stratégie simple: l’élite de l’armée de Sparte envahirait la Grèce centrale chaque année et obligerait les forces athéniennes plus faibles à se retirer derrière les Longs Murs. Les Spartiates pourraient alors librement ravager l’Attique, privant Athènes de ressources et forçant les Athéniens à solliciter la paix.
Cette stratégie présentait toutefois un sérieux inconvénient, car elle ne tenait pas compte, ou ignorait, que la puissance maritime athénienne et les Longs Murs de la cité assureraient le lien entre Athènes et la mer la cité pouvait donc sans difficulté répondre aux besoins d’approvisionnement de sa population. En outre, Périclès, l’artisan de la politique athénienne, avait compris que sa flotte pouvait déborder les forces terrestres spartiates s’il lançait des expéditions contre les territoires des membres de la ligue du Péloponnèse.
En 431, les forces de Sparte envahirent l’Attique, mais les Athéniens se retirèrent derrière leurs murs et les Spartiates retournèrent chez eux, laissant leurs adversaires libres d’intervenir sur le territoire du Péloponnèse. Il devenait évident que ce conflit serait extrêmement long pour chacun des adversaires, qu’il s’agirait d’une guerre d’usure plutôt que d’une victoire spectaculaire sur le champ de bataille. Les Spartiates revinrent en 430, mais trouvèrent Athènes ravagée par une épidémie de peste. Cet été-là, la mort de milliers de ses habitants n’entama pas la résolution de l’orgueilleuse cité, et la guerre se poursuivit avec une campagne secondaire menée par les Athéniens en Chalcidique. À cette époque, Archidamos comprit qu’au-delà de la famine qu’elle engendrait, l’invasion de l’Attique ne lui apportait que peu d’avantages militaires. Aussi, en 429, il conduisit son armée au nord, contre Potidée, cité alliée d’Athènes, qui résista à son siège. Les Spartiates retournèrent chez eux sans avoir tiré grand profit de leurs efforts.
C’est à ce moment-là que survint un événement qui affaiblit encore plus Sparte. Leur seul allié maritime, Corinthe, fut mis hors de combat à la suite d’une action de la flotte athénienne dans le golfe de Corinthe. La victoire athénienne fut toutefois ternie par la peste qui suivit la famine, dont mourut Périclès. Le seul chef athénien doué d’un génie politique doublé d’un bon sens militaire n’était plus. La guerre continua et, l’année suivante, Sparte était de retour devant les Longs Murs.
Une révolte à Mytilène, la capitale de l’île de Lesbos, menaça bientôt l’hégémonie athénienne. L’appel au secours de l’île fournit à Archidamos une nouvelle stratégie. Il avait besoin d’une marine et avait commencé à construire une flotte. Mais avant qu’il ne pût se lancer sur mer en 428, Athènes avait déjà écrasé les Samiens, ce qui lui faisait perdre l’occasion de semer la discorde dans la ligue de Délos.
La même année, Sparte s’empara de Platées, dont les défenseurs furent massacrés. Les cités grecques comprenaient progressivement qu’elles seraient probablement entraînées dans cette guerre, comme partisans de la démocratie du côté d’Athènes ou comme adeptes de l’oligarchie du côté de Sparte. Une révolte à Corcyre, sur l’île de Corfou, contraignit les troupes athéniennes à écraser une faction pro-oligarchique. Les Athéniens lancèrent alors une invasion malheureuse contre l’Étolie, avant de défendre leur base de Naupacte (prise à la Locride en 459) contre une attaque conjointe de l’Étolie et du Péloponnèse. Au cours de la bataille, le chef athénien Démosthène mit en déroute ses adversaires du Péloponnèse, infligeant ainsi à Sparte sa première véritable défaite.
En 425, une expédition athénienne s’empara de la côte ouest du Péloponnèse tandis que le gros de l’armée de Sparte occupait l’Attique. Démosthène établit une tête de pont à Pylos et utilisa la cité fortifiée comme base pour ses expéditions dans l’arrière-pays. Agis, le nouveau roi de Sparte, se porta rapidement à Pylos. Il encercla la base athénienne et plaça ses troupes sur l’île voisine de Sphactérie, qui fermait la baie de Pylos, de façon à empêcher d’autres débarquements.
Avant de repartir, les Athéniens résistèrent pendant deux jours aux attaques des Spartiates. Leur flotte repoussa une escadre ennemie plus faible et piégea à Sphactérie 420 soldats de Sparte. Ces hommes étaient l’élite de l’armée spartiate, une unité de combattants que l’on ne pouvait abandonner à son sort.
Des négociations de paix furent engagées sur place, et une attaque amphibie des Athéniens entraîna pour Sparte une défaite tellement humiliante qu’elle fit perdre à ses guerriers cette réputation d’invincibilité qui, depuis un siècle, les précédait sur les champs de bataille.
A près ses défaites de Pylos et de Sphactérie, Sparte se trouva forcée d’assurer la protection de ses côtes. Une tentative de s’emparer de Mégare, qui faisait partie de la ligue du Péloponnèse, à la suite d’une trahison, fut déjouée par un jeune général spartiate nommé Brassidas. Létoile montante de l’armée fut alors chargée de se rendre dans le nord pour harceler les alliés d’Athènes en Chalcidique et en Thrace.
Brassidas traversa la Thessalie, la Thrace, et entra en Chalcidique, alliée malgré elle à Athènes. Deux généraux athéniens essayèrent de couper les lignes de communication de Brassidas avec la Béotie, maintenant alliée de Sparte, le nœud du problème. Démosthène envoya son armée à Naupacte, sur le golfe de Corinthe, tandis qu’Hippocrate construisait un fort à Délion (Tanagra) sur la frontière entre la Béotie et l’Attique.
Cette division fut une erreur, car les forces béotiennes, plus importantes, balayèrent l’armée athénienne à Délion en 424 et tuèrent Hippocrate. À Naupacte, Démosthène était trop éloigné pour gêner Brassidas, d’autant qu’il redoutait que Sparte attaque s’il laissait le port sans défense. Malgré la présence d’une flotte athénienne non loin de l’île de Thasos, Brassidas s’empara par surprise d’une cité clé de la Chalcidique, Amphipolis, et persuada ses voisins de se révolter contre Athènes.
En dépit d’une tentative de trêve, la guerre en Chalcidique continua, et Athènes envoya deux expéditions pour la reconquérir. La cité de Skioné, favorable à Sparte, fut assiégée par Nicostrate, tandis qu’une force plus importante, commandée par Cléon, le successeur politique de Périclès, débarquait près d’Amphipolis. La bataille qui s’ensuivit (422) fut gagnée par Brassidas. Cléon fut tué et les Athéniens mis en déroute, alors que Brassidas, mortellement blessé au cours des dernières phases du combat, mourait quelques heures après ses ennemis.
Les deux adversaires, épuisés, avaient besoin de temps pour regrouper leurs forces et se réorganiser. Pour les Athéniens, il était clair que toute nouvelle campagne en Chalcidique pouvait menacer leur fragile empire, et les Spartiates ne se berçaient plus d’illusions sur la rapidité d’une victoire décisive. De plus, la guerre ne se limitait plus à l’affrontement entre deux cités-États: elle s’était étendue aux ligues rivales et menaçait de détruire l’ensemble du monde grec. Des pourparlers de paix débouchèrent sur le traité de Nicias, du nom du chef de la délégation diplomatique athénienne.
Signée lors du printemps 421, la paix de Nicias était censée imposer une trêve de cinquante ans entre les ligues rivales. Elle prévoyait le démembrement de la ligue du Péloponnèse, le retour de tous les prisonniers et la restitution à chacune des parties conquises pendant la guerre. Mais les États péloponnésiens de Corinthe, de Mégare et de la Béotie refusèrent de signer. Sparte refusa de quitter Amphipolis, et de nombreuses cités de Chalcidique refusèrent de se retrouver sous le joug d’Athènes, ce qui força Nicias à les punir. Lorsque Skioné tomba aux mains d’une armée athénienne, les hommes furent passés par l’épée et les femmes et les enfants vendus comme esclaves.
La paix de Nicias fut plus une accalmie qu’une sérieuse tentative de conciliation. Selon l’historien athénien Thucydide: «La trêve ne fut jamais correctement appliquée, et chacun chercha à faire le plus de mal possible à l’autre, jusqu’à ce que, finalement, ils fussent forcés de rompre le traité qu’ils avaient signé [ ... ] et, une fois encore de déclarer ouvertement la guerre à leur adversaire. »
Ce renversement débuta avec l’alliance de Corinthe, de Mantinée et d’Élis avec Argos pour former un nouveau bloc destiné à remplacer la ligue du Péloponnèse. En 419, Athènes, à son tour, s’allia à Argos, ce qui fournit aux stratèges de la cité une tête de pont dans le Péloponnèse, au sud de l’isthme de Corinthe. C’était une menace évidente contre Sparte et une entorse aux termes de la paix de Nicias. Alcibiade, jeune et prometteur aristocrate athénien, l’instigateur de cette opération, utilisa rapidement Argos pour lancer des attaques contre Épidaure, cité du Péloponnèse dans la sphère de Sparte. La guerre reprit de nouveau mais, cette fois, elle s’étendrait bien au-delà de la Grèce continentale.
En 418, le roi Agis de Sparte marcha sur Argos avec son armée et obtint la soumission de la ligue. Dès le départ des Spartiates, les habitants d’Argos rompirent le traité et se rallièrent la confédération alliée qui comprenait Mantinée, Élis et Athènes. Agis revint et affronta la ligue à Mantinée au cours de la plus grande bataille terrestre de la guerre.
Sparte sortit victorieux malgré un premier échec, et la ligue d’Argos s’effondra. Argos abandonna la cause athénienne et ses voisins alliés firent la paix avec Sparte. La situation était instable dans le Péloponnèse parce que Sparte avait rétabli sa domination. Ayant sécurisé leur arrière-pays, les Spartiates se préparaient à une nouvelle intervention d’Athènes, qui ne se fit pas attendre.
Cependant, l’opération engagée en 416 fut une grave erreur. Athènes attaqua l’île neutre de Mélos située dans le sud de la mer Égée. Ses habitants furent massacrés ou mis en esclavage ce qui déchaîna la colère de la plupart des grecs non alignés. Ne pouvant plus se présenter comme modèles de la démocratie, Athènes se dirigeait lentement vers l’isolement et l’autodestruction. En effet, la perte de Périclès avait laissé la cité sans aucun stratège vraiment capable de donner à la guerre le sens politique et militaire qui lui était nécessaire.
Au printemps 415, Athènes lança une expédition pour s’emparer de l’importante cité de Syracuse, sur la côte est de la Sicile. Fondée par les Doriens de Corinthe, Syracuse s’était tout naturellement ralliée à la cause des Doriens de Sparte. L’objectif de cette expédition était d’étendre l’influence d’Athènes à travers toute l’île pour priver Sparte de son approvisionnement en grain, mais aussi d’adjoindre à l’empire une région riche et fertile.
Alcibiade, le plus doué des jeunes commandants athéniens, fut d’abord désigné pour prendre la tête de l’expédition. Mais à la suite d’un scandale survenu à la veille de son départ en 415, il fut envoyé en exil, et prit plus tard le parti de Sparte. Pour le remplacer, la boulé choisit Nicias et Lamachos qui assureraient ensemble le commandement de l’opération qui comportait 134 trirèmes transportant 27 000 hommes dont 5 000 hoplites. Après avoir passé l’hiver à Catane, les généraux assiégèrent Syracuse et l’encerclèrent de façon à couper la cité du reste de l’île, tandis que la flotte en interdisait l’accès par la mer.
Alcibiade informa les Spartiates, et une petite force de secours fut envoyée sous les ordres avisés du général Gylippos. Il leva une armée de volontaires siciliens et les Spartiates se taillèrent un chemin à travers les lignes athéniennes pour approvisionner Syracuse et soutenir le moral de ses habitants. Puis Gylippos conseilla aux Syracusains de construire leurs propres contremurs pour éviter l’encerclement de la cité et couper les Athéniens de l’arrière-pays et de leurs sources d’approvisionnement. Au cours d’un engagement, où deux contre-murs furent détruits, Lamachos fut mortellement blessé, laissant Nicias - général dont l’incompétence disputait à la malchance - seul commandant.
Nicias demanda des renforts. Venant de Naupacte, 1200 hoplites à bord de 65 trirèmes arrivèrent sous le commandement de l’énergique Démosthène. Les Athéniens s’attaquèrent alors au contre-mur de Gylippos, mais l’assaut échoua. Nicias décida d’abandonner le siège, et se prépara à retirer ses troupes de Sicile. Leur départ fut retardé d’un mois en raison d’une éclipse de soleil qui était un mauvais augure.
Ce retard fut cher payé. Une flotte syracusaine prit la mer et brisa le blocus athénien. Puis elle bloqua ce qui restait de la flotte d’Athènes qui malgré tous ses efforts, ne réussit pas à rompre l’encerclement et dont les navires demeurèrent piégés dans le port. Le moral était au plus bas et des mutineries éclatèrent. Le gros de la flotte fut abandonné et l’armée se replia en groupes dispersés vers l’ouest. La cavalerie syracusaine se lança à leur poursuite et rattrapa l’arrière-garde athénienne commandée par Démosthène, qui fut forcé de se rendre. Le reste de l’armée fut piégé près d’une rivière, et beaucoup de ses soldats furent tués avant la reddition de Nicias (413). Les deux commandants furent exécutés et la plupart des prisonniers athéniens moururent en captivité.
Thucydide dit de l’expédition de Sicile qu’elle fut «la plus grande action de la guerre”. Il annonça: «Pour les vainqueurs, le plus brillant des succès, pour les vaincus, la plus calamiteuse des défaites, car ils furent totalement et définitivement battus. Leurs souffrances furent immenses, leurs pertes, comme ils le dirent, totales. L’armée, la flotte, tout fut détruit, et bien peu revinrent. » Le meilleur de son armée et de sa flotte étant anéanti, Athènes était au bord de la défaite.
L’échec de l’expédition sicilienne provoqua un retour à la guerre traditionnelle. Agis mena son armée vers le nord en 413, et réussit à envahir l’Attique pour la première fois depuis douze ans. Il ne pensait pas vraiment alors dévaster l’Attique ni enfermer les Athéniens à l’intérieur des Longs Murs. Il installa toutefois une base fortifiée permanente à Décélie, au nord d’Athènes. Au cours des neuf années qui suivirent, Sparte y maintint une forte garnison et utilisa cette base pour lancer des raids sur les campagnes de l’Attique, ce qui empêchait Athènes de s’y approvisionner. Décélie servit aussi de refuge pour des esclaves évadés, plus de 20 000, d’Athènes comme d’Attique. La présence permanente de Sparte au cœur de l’Attique interdisait à Athènes l’accès aux mines d’argent du Laurion, ce qui diminua considérablement les ressources de la cité.
Puis les Perses envoyèrent des ambassadeurs à Abris et, au grand dam des Athéniens, leurs deux anciens ennemis signèrent un pacte. La Perse espérait obtenir ainsi le démembrement d’Athènes et Sparte le financement nécessaire à la poursuite de la guerre. Avec l’aide de leur nouvc1 allié, les Spartiates construisirent une flotte puissante. En effet, à la suite du désastre de Syracuse, ils espéraient obtenir la suprématie navale, ce qui entraînerait immanquablement les défections des alliés d’Athènes de la ligue de Délos.
Athènes se reprit rapidement et reconstruisit une flotte suffisante pour contrer la menace en organisant un blocus autour du Péloponnèse. Cependant, Alcibiade le renégat, avec cinq galères, gagna l’île de Chios. Là, il fomenta une révolte qui s’étendit à travers la mer Égée. Chios, Mytilène, Milet et quelques petites cités formèrent une nouvelle alliance contre Athènes à l’instigation de Tissapherne de Chios.
Pour Athènes, l’avenir de la guerre semblait sans espoir face à Sparte et à la puissance de l’Empire Perse, qui n’avait pas oublié la défaite que la grande cité de l’Attique lui avait infligée. Athènes rassembla deux petites flottes. La première, de 46 navires, maqua Mytilène, ce qui entraîna bientôt la chute de Lesbos. Puis elle se dirigea vers Chios pour Affronter Alcibiade et Tissapherne. Les troupes Athéniennes débarquèrent, ravagèrent l’île et en assiégèrent la capitale. La seconde flotte, formée de 48 navires, établit le blocus de Milet. La chance favorisa Athènes lorsque Alcibiade, compromis dans un autre scandale, dut abandonner la cause de Sparte.
En 411, pendant un coup d’État oligarchique de quatre mois à Athènes, Alcibiade obtint son pardon et revint, en héros équivoque, avec pour mission de revitaliser la marine athénienne. Mais la même année, Athènes renoua avec le désastre : la flotte de Chios chassa les Athéniens qui l’assiégeaient. Rhodes rejoignit alors la révolte, et la désaffection pour Athènes s’étendit le long des iles ioniennes jusqu’à l’Hellespont. Il en résulta la rupture des lignes commerciales d’Athènes avec la mer Noire, ce qui mena la cité affamée au bord de la ruine. Le commandant spartiate du nord de la mer Egée, Mindaros, sentit que la victoire était à Sparte, mais Athènes n’était pas encore anéantie Alcibiade mena ce qui restait de sa flotte vers le nord et rencontra Mindaros à Cynosséma, au large des côtes de la Chersonèse. Le jeu fut payant, et la flotte de Sparte décimée. Une seconde victoire navale devant Abydos (411) fut presque décisive, mais Mindaros manœuvra pour sauver la plupart de ses galères qu’il put mettre à l’abri et réparer pendant l’hiver.
La joie de cette victoire fut toutefois de courte durée pour Athènes, car elle apprit la victoire navale de Sparte à Étrérie, dans l’île d’Eubée, qui se révolta. Au printemps de 410, la chance, une fois encore, favorisait Athènes. À la fin de l’hiver, une force conjointe des Spartiates de Mindaros et des Perses s’était emparée de Cyzsique. La flotte athénienne les poursuivit, les rattrapa, les détruisit, et reprit la cité. Mindaros mourut pendant la bataille. C’était maintenant au tour de Sparte de demander la paix. Mais Athènes refusa. La guerre entra dans une ultime et sinistre phase.
A la suite de la déroute des Spartiates et les Perses à Cyzsique, Athènes reprit le contrôle de la plus grande partie de l’Hellespont. La reconquête de Pylos, dans le Péloponnèse, par Sparte, compensa quelque peu leur défaite en Asie Mineure. Alcibiade était devenu, après de nombreuses manœuvres politiques, le commandant et le principal homme d’état athénien. Il lança en 408 une importante expédition pour rendre à l’empire athénien les cités et les îles de l’est de la mer Égée. Cette action l’opposa à son vieil ennemi, et pour un temps collègue malgré lui, le nouveau commandant spartiate Lysandre, qui s’était établi avec son allié perse Cyrus le Jeune à Éphèse, sur les côtes d’Asie Mineure.
Tandis qu’Alcibiade assiégeait Phocée sans succès, son second commandant, Antiochos, était repoussé par Éphèse. Alcibiade fut alors rappelé à Athènes où il comparut devant une ecclesia furieuse. À nouveau, il dut s’exiler en Thrace, et disparut de la vie politique.
Le nouveau général, Conon, qui le remplaça rejoignit la flotte athénienne à Samos où elle réparait ses avaries. Il trouva le moral des hommes au plus bas, les caisses vides, et découvrit un opposant en la personne de l’adjoint de Lysandre, Callicratidas, qui commandait une force beaucoup plus importante que la sienne. Les finances athéniennes avaient été utilisées pour construire de nouveaux navires pour Conon et, finalement, les deux escadres s’affrontèrent en 406 au large des îles Arginuses. Les Spartiates furent battus et Callicratidas tué au cours de la plus grande bataille navale de la guerre.
Cette victoire, qui s’accompagnait d’une nouvelle domination sur le monde égéen, redonna suffisamment confiance à Athènes pour refuser une seconde offre de paix de Sparte. Cette euphorie n’était toutefois qu’une illusion puisque les caisses restaient vides et qu’une flotte spartiate renforcée sous le commandement de Lysandre s’approchait déjà de l’Hellespont. La flotte athénienne suivit, mais elle ne put répéter le succès d’Alcibiade de 410.
S’étant emparé de Lampsaque sur la côte asiatique pour en faire sa base, Lysandre revint de façon inattendue pour se battre. Prise par surprise, presque toute la flotte athénienne fut piégée sur les rives de Gallipoli, près d’Aigos Potamos. Lysandre détruisit ou captura 170 trirèmes, n’en laissant s’échapper que dix. Il exécuta aussi les 3000 prisonniers, ce qui levait ainsi le dernier obstacle entre Sparte et Athènes.
Alors qu’Athènes se préparait pour le siège, Lysandre naviguait vers l’Attique. Il y arriva au printemps 405 et mit le siège aux pieds des Longs Murs. Comme elle ne pouvait plus s’approvisionner par la mer, en mars 404, Athènes fut contrainte de se rendre. En regard de la longueur et de la cruauté du conflit, les conditions de paix offertes par Sparte furent particulièrement clémentes. Les Athéniens devaient démanteler les Longs Murs, et leur flotte ne devait pas dépasser dix navires. L’« empire» fut dissous et Athènes dut reconnaître la suprématie de Sparte sur l’ensemble de la Grèce. Toutefois, la cité elle-même n’était pas touchée et, en raison de l’état désastreux de ses finances, elle garda pour son usage domestique l’exploitation de l’arrière-pays attique.
La domination politique de Sparte était fondée sur sa puissance militaire, mais son contrôle sur la Grèce ne fut pas total. Thèbes émergeait comme une polis puissante et indisciplinée dans la Grèce centrale, la dilapidation des richesses et de la main-d’œuvre dans les autres cités-États grecques empêchait Sparte de bien les maintenir sous son contrôle. Pire, la victoire finale, obtenue en acceptant l’aide des gouverneurs perses de Lydie, les avaient réintroduit en mer Égée, pour la première fois depuis soixante-dix ans. Au cours de la dernière phase de la guerre, de nombreuses cités ioniennes se retrouvèrent encore une fois entre les mains habiles des Perses.
La démocratie reprit le dessus, et Athènes retrouva sa position de centre culturel du monde grec mais, selon Sparte, ses oligarchies restaient le mode de gouvernement le plus commun en Grèce dans les années précédant l’invasion macédonienne. Les cités-États avaient été affaiblies par trois décennies de guerre, et les Grecs n’étaient pas prêts à affronter un nouvel envahisseur, Et c’est bien à ce niveau-là que la guerre du Péloponnèse signa le commencement du déclin de la Grèce antique.