La bataille de Drépane s’inscrit dans la Première guerre punique (264-241 av. J.-C.), alors que les Romains cherchent à assiéger les positions carthaginoises restantes en Sicile, notamment Lilybée et Drépane. Forts de leurs précédentes victoires navales, comme celles de Mylae (260 av. J.-C.) et du Cap Ecnome (256 av. J.-C.), les Romains tentent de priver Carthage de ses bases en Sicile en imposant des blocus.
Malgré les efforts romains, Carthage parvient à ravitailler Lilybée grâce à une série de manœuvres audacieuses, orchestrées par un commandant nommé Hannibal (différent de Hannibal Barca). Ces ravitaillements successifs sapent l'efficacité du blocus romain et poussent le consul Publius Claudius Pulcher à tenter une attaque décisive contre le port de Drépane, principal soutien logistique de Lilybée.
Préparations romaines : Publius Claudius Pulcher, frustré par les échecs répétés du blocus de Lilybée, décide de mener une attaque surprise contre Drépane. Sous le couvert de la nuit, la flotte romaine quitte Lilybée pour attaquer le port de Drépane, espérant piéger les Carthaginois dans leur propre base.
Mauvais augures : Avant l’attaque, Pulcher procède au rituel des auspices en observant le comportement de poulets sacrés pour obtenir un présage. Lorsque les poulets refusent de manger, signe de mauvais augure, il les jette à la mer en déclarant sarcastiquement : « Qu’ils boivent s’ils ne veulent pas manger. » Cet incident provoque la colère et la démoralisation de ses troupes superstitieuses.
Échec de l’attaque surprise : La flotte romaine atteint Drépane au lever du jour, mais sa formation est désorganisée et son approche est repérée par les éclaireurs carthaginois. L’amiral Adherbal, commandant la flotte carthaginoise, décide de ne pas attendre l’assaut et fait sortir ses navires du port pour engager les Romains en pleine mer.
Déroute romaine : La flotte romaine, prise en tenaille entre la côte et la flotte carthaginoise, est incapable de manœuvrer efficacement. Adherbal utilise la supériorité des marins carthaginois pour attaquer les navires romains à l’arrière de leur ligne. Le combat tourne rapidement à la déroute pour les Romains, qui perdent la majorité de leurs navires, coulés ou capturés. Pulcher parvient à s’échapper, mais sa flotte est anéantie.
Victoire décisive pour Carthage : La bataille de Drépane est une des rares victoires navales majeures de Carthage durant la Première guerre punique. La flotte romaine subit des pertes considérables, affaiblissant temporairement leur contrôle maritime en Sicile.
Disgrâce de Pulcher : De retour à Rome, Publius Claudius Pulcher est accusé de sacrilège pour son comportement lors des auspices. Il est condamné à l’exil, marquant la fin de sa carrière politique.
Désastre naval romain : La même année, l’autre moitié de la flotte romaine, commandée par Lucius Iunius Pullus, est détruite par une tempête. Ces événements combinés plongent Rome dans une crise maritime, la forçant à suspendre ses opérations navales pendant sept ans.
Reprise d’initiative pour Carthage : La victoire renforce la position carthaginoise en Sicile. Sous le commandement d’Hamilcar Barca, Carthage lance une série de campagnes terrestres victorieuses, consolidant ses positions restantes sur l’île.
Crise pour Rome : La défaite de Drépane met en lumière les limites de la stratégie navale romaine, notamment leur dépendance excessive au corbeau, inefficace dans des conditions de combat complexes. Rome se concentre alors sur des opérations terrestres jusqu’à la reconstruction de sa flotte en 242 av. J.-C.
Prolongation de la guerre : L’échec de Rome à Drépane et la destruction de ses flottes retardent considérablement la conclusion de la guerre. Ce n’est qu’en 241 av. J.-C., après une nouvelle victoire navale romaine aux îles Égates, que la Première guerre punique prendra fin.
Auteur : Stéphane Jeanneteau
Janvier 2011