Au début du IVᵉ siècle av. J.-C., l'Italie centrale est un territoire fragmenté, dominé par une mosaïque de peuples aux intérêts divergents. Parmi eux, les Samnites, peuple montagnard installé dans les Apennins, contrôlent une large région de l'Italie méridionale. Les Samnites vivent principalement de l’agriculture et de l’élevage, et leur société guerrière repose sur une confédération de tribus, leur conférant une certaine souplesse stratégique. De leur côté, Rome, encore une cité-État en pleine expansion, cherche à sécuriser ses frontières et à étendre son influence au-delà du Latium, particulièrement en Campanie, région riche et stratégique.
Les ambitions expansionnistes des deux puissances les mettent rapidement en conflit. La Campanie, région fertile et densément peuplée, devient un enjeu majeur. Au IVᵉ siècle av. J.-C., les Samnites fondent un État autour de Capoue, s'assurant un accès à cette riche plaine. Cependant, leur présence y est contestée par les cités locales et par Rome, qui considère la Campanie comme une zone stratégique pour le contrôle du commerce et des routes militaires.
En parallèle, Rome, renforcée par ses victoires contre les Étrusques et la Ligue latine, cherche à projeter sa puissance au-delà du Latium. La fondation de colonies romaines sur les frontières samnites, comme Calès en 335 av. J.-C., reflète cette volonté d’expansion territoriale et de consolidation des frontières.
Le déclenchement des guerres samnites est également favorisé par le jeu complexe des alliances locales. De nombreux peuples italiques, comme les Sidicins et les Campaniens, cherchent à se protéger de l’expansion samnite en appelant Rome à leur secours. En 343 av. J.-C., lorsque les Samnites menacent les Sidicins de Teanum, ces derniers demandent l’aide des Campaniens de Capoue, qui eux-mêmes se tournent vers Rome. Cette dynamique provoque un enchevêtrement d’alliances qui rend le conflit inévitable.
En 354 av. J.-C., Rome et les Samnites avaient conclu un traité de paix, délimitant leurs sphères d’influence respectives. Toutefois, ce traité s'avère rapidement insuffisant pour prévenir les frictions entre les deux puissances. Les incursions samnites en Campanie et les ambitions de Rome sur cette région fertile rendent l’affrontement inéluctable.
La première guerre samnite marque le premier grand conflit de Rome en dehors de sa région natale du Latium. En 354 av. J.-C., Rome et les Samnites avaient conclu un traité d’alliance, délimitant leurs sphères d’influence respectives. Cependant, cette entente est rapidement mise à mal par les rivalités croissantes entre les deux puissances, notamment en Campanie, une région fertile et stratégique.
Vers 343 av. J.-C., les Samnites montagnards lancent des incursions contre les Sidicins, un peuple voisin de Teanum. Face à la menace, les Sidicins demandent de l’aide aux Campaniens de Capoue, qui, incapables de résister seuls, se tournent vers Rome pour obtenir un soutien militaire. Selon les récits traditionnels, les Campaniens auraient prononcé la formule du deditio (« soumission »), se plaçant ainsi entièrement sous la protection de Rome, bien que cette version soit probablement embellie pour justifier l’intervention romaine.
Rome accepte l’appel à l’aide des Campaniens et entre en guerre contre les Samnites. Ce conflit marque la première confrontation directe entre ces deux puissances.
La première guerre samnite se termine sans véritable vainqueur. Rome ne parvient pas à exploiter pleinement ses succès militaires en raison des troubles internes liés à la rébellion latine. Cependant, le conflit entraîne des changements importants dans la région :
La première guerre samnite est donc un conflit court mais significatif, marquant la première incursion de Rome au-delà de ses frontières traditionnelles. Elle met en lumière l’importance stratégique de la Campanie et illustre les tensions croissantes entre les ambitions romaines et celles des autres puissances italiennes.
La deuxième guerre samnite, beaucoup plus longue et intense que la première, trouve ses origines dans les tensions croissantes entre Rome et les Samnites. Après la conclusion de la première guerre samnite, Rome étend progressivement son influence en Campanie et au-delà, notamment par la fondation de colonies comme Calès en 335 av. J.-C. et Frégelles en 328 av. J.-C., dans des zones proches ou au sein de l’influence samnite. Cette expansion romaine, perçue comme une provocation, exacerbe les rivalités territoriales.
Le déclencheur immédiat du conflit est l’« affaire de Naples ». En 327 av. J.-C., Naples, une cité située en Campanie, est divisée entre un parti favorable à Rome et un autre soutenant les Samnites. Rome intervient militairement pour s’assurer le contrôle de la cité, ce qui conduit à une déclaration de guerre des Samnites.
La deuxième guerre samnite est un tournant dans l’histoire de la République romaine, marquant un changement durable dans l’équilibre des pouvoirs en Italie.
Après la deuxième guerre samnite, Rome continue de renforcer son influence en Italie, notamment par l’intégration de nouveaux territoires et la fondation de colonies dans des régions stratégiques. Les Samnites, affaiblis mais toujours résolus à contester l’hégémonie romaine, cherchent à unir les peuples italiques contre leur ennemi commun.
Le contexte politique évolue également : les Étrusques, les Ombriens et les Gaulois du nord de l’Italie, craignant l’expansion romaine, rejoignent les Samnites pour former une coalition. Ce conflit, souvent qualifié de « guerre italique », reflète la tentative désespérée de ces peuples de préserver leur autonomie face à la montée en puissance de Rome.
Le traité conclu en 290 av. J.-C. consacre la soumission des Samnites à Rome :
La défaite des Samnites scelle également le sort de plusieurs autres peuples italiques. Les Étrusques, les Ombriens et les Gaulois subissent des revers importants et n’ont plus la capacité de contester sérieusement l’expansion romaine.
Rome renforce sa position grâce à la fondation de colonies stratégiques, l’intégration des territoires conquis dans son système de gouvernement, et l’incorporation des peuples vaincus dans son réseau d’alliances. Cette guerre marque une étape cruciale dans la transformation de Rome en puissance régionale.
Auteur : Stéphane Jeanneteau
Décembre 2010