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Le sac de Rome  (410 Ap. J.C.)

la montée en puissance des Wisigoths

Le sac de Rome en 410 est le fruit d'une série d'événements remontant à la fin du IVe siècle, lorsque les Wisigoths, fuyant les Huns, obtiennent l'autorisation de s'installer dans l'Empire romain à la suite du traité de 382. Cependant, les relations entre les Wisigoths et l'Empire se détériorent rapidement en raison des vexations romaines et des ambitions gothiques. Sous la direction d'Alaric, successeur de Fritigern, les Wisigoths deviennent un acteur politique et militaire de premier plan.

Alaric, après avoir servi dans les armées romaines sous Théodose Ier, est frustré par le traitement réservé à ses troupes. Après la mort de Théodose en 395, Alaric se retourne contre l'Empire, menant plusieurs campagnes qui culminent avec l'invasion de l'Italie. La résistance initiale de Stilicon, notamment lors des batailles de Pollentia (402) et de Vérone (403), freine temporairement Alaric, mais l'exécution de Stilicon en 408 par Honorius affaiblit considérablement la défense romaine. Ce vide stratégique permet à Alaric de relancer ses ambitions.


Les événements de 410 : le siège et le sac de Rome

Malgré les fortifications de Rome, la ville est vulnérable. Les garnisons romaines sont dispersées, et l'empereur Honorius reste reclus à Ravenne, refusant de négocier avec Alaric. En 408, Alaric impose un premier siège, forçant le Sénat à payer un lourd tribut. Toutefois, en 410, devant le refus persistant de concessions significatives de la part d’Honorius, Alaric décide de prendre Rome.

Le 24 août 410, les Wisigoths entrent dans la ville, probablement grâce à une trahison interne. Pendant trois jours, Rome est pillée. Les demeures sénatoriales, les forums et les archives impériales subissent des destructions massives. Les églises de Saint-Pierre et Saint-Paul, en revanche, sont épargnées sur ordre d'Alaric, qui impose une certaine discipline à ses troupes. Malgré ces précautions, des bibliothèques, œuvres d’art et bâtiments sont irrémédiablement détruits, et une partie de la population est massacrée.

Alaric quitte Rome après le sac, emmenant Galla Placidia, sœur de l'empereur Honorius, comme otage. Il poursuit son expédition dans le sud de l’Italie, envisageant une invasion de l’Afrique, mais meurt fin 410 avant de pouvoir réaliser ce projet. Son beau-frère Athaulf lui succède et conduit les Wisigoths vers le nord.


Conséquences immédiates : traumatisme et choc culturel

Le sac de Rome par les Wisigoths provoque une onde de choc dans tout l'Empire romain. La ville, symbole de la puissance et de l'éternité de l'Empire, est brutalement humiliée. L’événement alimente un sentiment de désarroi généralisé, particulièrement parmi les élites romaines. Saint Jérôme, dans une lettre poignante, qualifie Rome de « tombeau du peuple romain ».

Le sac de Rome devient également un tournant idéologique. Les païens accusent l'adoption du christianisme d'être responsable de ce désastre. En réponse, saint Augustin rédige La Cité de Dieu, une défense du christianisme face à ces critiques, et Paul Orose compose une Histoire contre les païens, cherchant à démontrer que la chute de Rome est due à des causes internes et non religieuses.


Interprétations historiques : chute ou transformation ?

Certains historiens considèrent le sac de Rome en 410 comme un marqueur symbolique de la fin de l'Empire romain d’Occident, bien avant la destitution de Romulus Augustule en 476. Ils soulignent l’affaiblissement irréversible du pouvoir impérial et la montée en puissance des royaumes barbares.

D'autres, en revanche, adoptent une perspective plus nuancée, parlant de transformation plutôt que de chute brutale. Ils mettent en lumière la continuité culturelle entre l'Antiquité tardive et le Moyen Âge, ainsi que l’intégration progressive des peuples barbares dans le cadre impérial. Le sac de Rome, bien que traumatisant, s'inscrit dans un processus de déclin progressif marqué par des adaptations politiques et sociales.


Sources et références

  1. Ammien Marcellin, Res Gestae.
  2. Edward Gibbon, The Decline and Fall of the Roman Empire.
  3. Saint Augustin, La Cité de Dieu.
  4. Peter Heather, The Fall of the Roman Empire: A New History of Rome and the Barbarians.
  5. J. B. Bury, History of the Later Roman Empire.


Auteur : Stéphane Jeanneteau

Mars 2011