Les Angles sont un peuple germanique dont les origines restent partiellement obscures. Leur nom provient probablement du latin gens Anglorum, et ils donnent leur nom à l’Angleterre (England) et aux Anglais (English). Plusieurs hypothèses s’entrecroisent quant à leur territoire d’origine, leur composition ethnique, et leur cheminement historique avant leur installation en Grande-Bretagne.
Selon les historiens antiques et médiévaux, les Angles seraient originaires des régions côtières de la mer du Nord, plus précisément dans une zone comprise entre la Frise (actuelle Hollande) et le sud de la péninsule du Jutland (actuel Danemark). Leur nom pourrait venir d’un mot germanique signifiant "angle" ou "coin", en référence à leur territoire d’origine dans l’actuelle péninsule danoise.
Les Angles font partie des peuples germaniques mentionnés par Tacite au Ier siècle de notre ère, bien qu’ils ne soient pas décrits en détail. Tacite parle d’un ensemble de peuples germaniques, regroupés en tribus semi-autonomes, souvent dominées par des alliances temporaires. Leur société aurait été organisée autour de clans et de chefs locaux.
Les Angles, comme d’autres peuples germaniques, partageaient un panthéon païen dominé par des divinités telles que Woden (Odin), auquel ils attribuaient des lignées royales. Ils étaient aussi des guerriers aguerris, habitués à la navigation en mer, ce qui les rendait aptes à des campagnes de conquête et d’installation dans de nouveaux territoires.
La migration des Angles s’inscrit dans le contexte des grandes invasions germaniques entre le IVe et le Ve siècle. À cette époque, des tribus germaniques commencent à quitter leurs terres natales pour chercher de nouvelles régions à coloniser ou piller. Les Angles faisaient partie d’un ensemble de peuples côtiers, souvent associés aux Saxons, aux Jutes et aux Frisons.
Premiers déplacements : Au début du Ve siècle, des groupes d’Angles quittent leurs terres natales pour entreprendre une migration massive. Selon les sources, ces migrations auraient été motivées par une pression démographique, des changements climatiques, ou la menace d’autres peuples germaniques et scandinaves comme les Danois.
Alliances avec d’autres tribus : Les Angles s’allient aux Jutes et aux Saxons dans leur migration vers l’ouest. Ensemble, ils forment ce que l’histoire retient comme les "Anglo-Saxons". Cette coalition facilite leur succès dans les raids contre les Bretons en Grande-Bretagne.
Selon Bède le Vénérable, les Angles seraient guidés par deux frères légendaires, Hengist et Horsa, présentés comme descendants de Woden. Ces figures jouent un rôle clé dans l’historiographie chrétienne, qui cherche à donner un sens providentiel à leur migration. Bède décrit leur arrivée en Grande-Bretagne comme un "châtiment divin" infligé aux Bretons pour leurs péchés, inscrivant ainsi leur histoire dans une vision chrétienne de l’histoire universelle.
Les découvertes archéologiques, notamment la tombe royale de Sutton Hoo, montrent que les Angles partageaient une culture proche de celle des peuples scandinaves et germaniques du Nord. L’orfèvrerie, les armes, et les motifs artistiques témoignent de liens culturels avec la Suède, la Norvège et le Danemark. Les similitudes linguistiques entre les dialectes germaniques de l’époque renforcent l’idée de leur appartenance à cette aire culturelle.
Dès le début du Ve siècle, les Angles apparaissent comme des mercenaires ou des pirates en Mer du Nord, harcelant les côtes de la Grande-Bretagne et de la Gaule. Le retrait des troupes romaines de Bretagne en 410 ouvre la voie à leur migration massive. Les récits indiquent qu’ils sont initialement invités par les Bretons pour défendre l’île contre les Scots et les Pictes. Cette installation temporaire évolue rapidement en une conquête durable, marquant la transition des Angles de simples migrants à fondateurs de royaumes.
Les Angles, sous la direction légendaire de Hengist et Horsa, s’installèrent en Grande-Bretagne au Ve siècle. Le retrait des troupes romaines en 410 laissa l’île sans défense, facilitant leur installation. Bien que Bède attribue leur arrivée à un plan divin pour châtier les Bretons, leur migration s’inscrit dans le contexte des invasions barbares qui caractérisent la fin de l’Antiquité.
Dès les années 430, l’immigration des Angles et de leurs alliés devint massive. Ils s’établirent dans plusieurs régions de l’île, fondant des royaumes qui allaient façonner l’histoire de l’Angleterre.
Au VIIe et VIIIe siècles, les Angles contribuèrent à l’établissement de plusieurs royaumes anglo-saxons. Les principaux royaumes des Angles furent :
La Northumbrie : Située au nord de la rivière Humber, elle devint un centre culturel et religieux important sous le règne de rois comme Edwin. York devint une capitale intellectuelle avec l'école archiépiscopale, rayonnant jusqu'à l'époque carolingienne.
La Mercie : Située au centre de l’île, elle demeura longtemps païenne sous Penda avant de devenir un royaume puissant sous Æthelbald et Offa.
L’Est-Anglie : Son roi le plus célèbre est Redwald, associé à la tombe royale de Sutton Hoo, un trésor archéologique majeur attestant des échanges entre les Angles, les Francs, et les Scandinaves.
Les Angles, bien que dispersés dans plusieurs royaumes, commencèrent à être perçus comme un peuple uni grâce à des figures comme Bède, qui souligna leur identité commune au-delà des divisions politiques.
Les Angles entretenaient des liens diplomatiques et culturels étroits avec les Francs. Le trésor de Sutton Hoo, composé de monnaies mérovingiennes, témoigne de ces relations. L’union du roi du Kent, Æthelbert, avec Berthe, fille de Caribert Ier, renforça ces échanges. Berthe joua un rôle crucial dans la christianisation de l’Angleterre en favorisant l’installation du premier évêché à Canterbury.
Au VIIe siècle, les royaumes issus des migrations anglo-saxonnes se sont consolidés en Angleterre sous la forme de plusieurs entités distinctes, notamment l'Est-Anglie, la Mercie, et la Northumbrie, qui sont particulièrement associés aux Angles. Ces royaumes, bien qu’indépendants les uns des autres, partageaient une culture et des structures sociales similaires, basées sur un mélange d’héritages germaniques et de traditions chrétiennes introduites par les missionnaires romains et irlandais.
L’unité politique était fragile et sujette aux luttes internes, ainsi qu’aux rivalités entre les royaumes voisins. Cependant, ces entités évoluèrent sous la menace croissante des invasions vikings et des tensions avec d’autres royaumes germaniques, comme ceux des Saxons (notamment le Wessex) et des Jutes.
La fin des royaumes angles débute avec l'arrivée des Vikings, également connus sous le nom de "danois" ou "hommes du Nord", à la fin du VIIIe siècle. Les premiers raids commencent par des attaques sporadiques contre des monastères, notamment celui de Lindisfarne (793) et celui de Jarrow (794), situés en Northumbrie. Ces raids ne visaient pas seulement les richesses des monastères, mais constituaient également une première phase d'incursions visant à tester la résistance des royaumes anglo-saxons.
Les royaumes angles, bien que prospères, étaient politiquement morcelés et militairement vulnérables. La fragmentation interne les empêchait de répondre efficacement à cette nouvelle menace.
Au IXe siècle, les invasions vikings prennent une tournure plus organisée avec l'arrivée de la "Grande Armée" en 865. Cette force, composée de Vikings danois et norvégiens, avait pour objectif non seulement de piller, mais aussi de conquérir et de s’installer durablement sur les terres anglaises.
La Northumbrie, autre royaume majeur des Angles, subit elle aussi une série de coups décisifs. Dès 867, la ville de York tombe entre les mains des Vikings, marquant le début de la fin pour ce royaume. La Northumbrie est divisée : la partie méridionale passe sous contrôle danois, tandis que le nord reste sous l'autorité de rois locaux réduits à des marionnettes des envahisseurs.
Le royaume de Mercie, autre grand bastion des Angles, résiste plus longtemps grâce à une succession de rois énergiques, notamment Offa (757–796), qui étend son influence sur une grande partie de l’Angleterre. Cependant, la Mercie commence à décliner dès la fin du VIIIe siècle en raison de rivalités internes et de pressions externes.
Au IXe siècle, la Mercie est envahie par les Vikings, qui établissent un contrôle partiel sur le royaume. La partie occidentale, non conquise, devient un vassal du Wessex, le royaume saxon le plus puissant, sous le règne du roi Alfred le Grand. À la fin du IXe siècle, la Mercie perd son indépendance et est intégrée progressivement dans le royaume unifié d’Angleterre.
La montée en puissance du Wessex marque la fin définitive des royaumes des Angles. Sous le règne d’Alfred le Grand (871–899) et de ses successeurs, le Wessex mène la résistance contre les Vikings, repousse leurs avancées, et entreprend de reconquérir les territoires perdus.
En 927, Æthelstan devient le premier roi d'une Angleterre unifiée, mettant ainsi fin à l’existence indépendante des royaumes angles.
Bien que les royaumes angles aient disparu en tant qu'entités politiques indépendantes, leur influence perdure à travers plusieurs aspects de la culture anglaise :
Auteur : Stéphane Jeanneteau
Septembre 2010