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Les Chattes

Les Chattes : Un peuple germanique influent

Les Chattes (latin Chatti) sont un ancien peuple germanique situé dans la région correspondant à l’actuelle Hesse, au nord-ouest de l'Allemagne, près des cours supérieurs de la Weser et de l’Eder. Leur nom survit aujourd’hui dans celui de la Hesse (Hassia en latin médiéval). Ils étaient liés à d’autres tribus germaniques comme les Suèves et les Chérusques, avec qui ils formaient, selon Pline l’Ancien, une fédération ethnique appelée les Herminones. Leur histoire et leur influence sur la Germanie et l’Empire romain sont attestées par plusieurs sources classiques, notamment Pline l’Ancien, Tacite et Suétone.


Origines et caractéristiques culturelles

Les Chattes sont cités pour la première fois dans les écrits de Pline et Tacite. Ce dernier décrit un peuple germanique organisé, discipliné, et reconnu pour sa forte capacité militaire. Ils se distinguaient par une approche guerrière pragmatique et leur aptitude à organiser des campagnes prolongées.

Tacite souligne également leur rituel distinctif : les jeunes guerriers Chattes laissaient pousser leurs cheveux et leur barbe jusqu'à ce qu'ils aient tué un ennemi, symbolisant leur passage à l'âge adulte et leur honneur guerrier. Cette coutume soulignait leur attachement aux valeurs de courage et de discipline militaire.

Les Bataves et les Mattiaci, deux tribus souvent mentionnées dans les sources romaines, auraient été des subdivisions ou des peuples proches des Chattes avant de se séparer pour diverses raisons, notamment leurs alliances avec Rome.


Les Chattes face à l'Empire romain

La bataille de Teutoburg (9 ap. J.-C.)

Les Chattes jouèrent un rôle important dans la célèbre bataille de Teutoburg, où les tribus germaniques, sous la direction d'Arminius (un chef des Chérusques), infligèrent une défaite historique aux légions romaines dirigées par Varus. Cet événement mit fin à l’expansion romaine au-delà du Rhin. Les Chattes furent ainsi des acteurs majeurs dans la résistance contre la domination romaine en Germanie.

La campagne de Germanicus (16 ap. J.-C.)

En réponse à la défaite de Teutoburg, Germanicus, général romain et neveu de l’empereur Tibère, lança une campagne punitive contre les tribus germaniques, dont les Chattes. Lors de ces affrontements, leur capitale, Matium (située dans l'actuelle Hesse), fut incendiée par les Romains. Cet épisode affaiblit temporairement les Chattes, mais ils continuèrent à représenter une menace pour Rome.

Les raids et les affrontements au Ier siècle

Les Chattes poursuivirent leurs raids sur le territoire romain au cours du Ier siècle, franchissant régulièrement le Rhin pour attaquer les provinces romaines. En 37 ap. J.-C., le général romain Lucius Pomponius mena une campagne punitive contre eux, libérant des prisonniers romains capturés lors de la bataille de Teutoburg et prenant des otages, y compris la fille d’un chef des Chattes, Catumerus.

En 70 ap. J.-C., pendant la révolte batave dirigée par Civilis, les Chattes apportèrent leur soutien aux Bataves contre Rome. Ce soulèvement échoua, renforçant la domination romaine sur les régions proches du Rhin.


Les Chattes sous la pression romaine

L’empereur Domitien (81-96 ap. J.-C.) lança plusieurs campagnes contre les tribus germaniques de l’intérieur, y compris les Chattes. Ces conflits marquèrent une période de résistance intense mais fragmentée. Rome renforça le limes, une série de fortifications le long du Rhin et du Danube, qui devint une barrière permanente contre les incursions germaniques.

Malgré ces défaites, les Chattes conservèrent leur identité culturelle et continuèrent à résister à l’influence romaine.


Transition au christianisme

Au début du VIIIe siècle, les Chattes commencèrent à être christianisés, notamment sous l’influence de Saint Boniface, un missionnaire anglo-saxon. En 723, Boniface fit abattre un chêne sacré près de Fritzlar, un lieu central pour leur culte païen. Cet acte marqua symboliquement le début de leur conversion au christianisme. La christianisation progressive fut accompagnée de l’intégration des Chattes dans les structures féodales émergentes de l’Europe médiévale.


Héritage des Chattes

Le peuple des Chattes finit par être absorbé dans les royaumes médiévaux qui émergèrent après la chute de l’Empire romain. Leur territoire devint un noyau de la région historique de la Hesse. Bien que leur nom disparut en tant qu’entité tribale, leur mémoire survit dans la toponymie et les récits historiques.


Conclusion

Les Chattes furent un peuple germanique influent dans les premiers siècles de notre ère, jouant un rôle clé dans la résistance contre Rome. Leur culture, marquée par des traditions guerrières distinctives, leur participation aux grandes révoltes germaniques et leur transition au christianisme, fait d’eux un peuple emblématique des interactions entre les mondes romain et germanique. Leur intégration dans la Hesse marque la fin de leur indépendance ethnique mais laisse un héritage durable dans l’histoire européenne.


Sources :

  1. Pline l'Ancien, Histoire naturelle.
  2. Tacite, Germania et Annales.
  3. Suétone, Vie des douze Césars.
  4. Études modernes sur la Germanie romaine et les migrations germaniques.


Auteur : Stéphane Jeanneteau

Septembre 2010