Les Mérovingiens, dynastie des rois francs saliens, règnent sur la Gaule de la fin du Ve siècle au milieu du VIIIe siècle. Les Francs, peuple germanique, apparaissent initialement comme fédérés de l’Empire romain, protégeant ses frontières nord et combattant à ses côtés contre les Huns et autres barbares. Mais avec l’affaiblissement de l’Empire, les Francs avancent progressivement vers le sud.
Au Ve siècle, ils se divisent en deux groupes majeurs :
Clovis (481-511) marque le début de la véritable histoire des Francs. À la tête de sa tribu salienne, il :
À sa mort en 511, Clovis laisse un royaume étendu sur la majeure partie de la Gaule. Cependant, selon les traditions germaniques, ce royaume est considéré comme une propriété privée et est divisé entre ses quatre fils, compromettant l’unité de l’État.
Dagobert Ier (622-639), fils de Clotaire II, est le dernier roi mérovingien à exercer un pouvoir réel. Il :
Son règne marque l’apogée du pouvoir mérovingien avant son déclin.
Après Dagobert Ier, la dynastie décline rapidement :
À la mort de Clovis en 511, son royaume s’étend sur la majeure partie de la Gaule. Cependant, conformément aux traditions germaniques, le royaume est considéré comme une propriété privée, devant être partagée entre les héritiers. Cette pratique, bien que légitime dans la culture franque, fragilise l’unité du royaume.
Le royaume de Clovis est divisé entre ses quatre fils :
Chaque prince établit sa propre cour et gouverne indépendamment. Ce partage arbitraire engendre des rivalités entre frères, favorisant les conflits internes et affaiblissant la dynastie.
Carte du partage du royaume Franc à la mort de Clovis
Clodomir meurt lors de la bataille de Vézeronce contre les Burgondes. Ses trois jeunes fils sont confiés à leur grand-mère Clotilde. Cependant, leurs oncles Childebert et Clotaire, motivés par des ambitions territoriales, éliminent deux des enfants et forcent le troisième, Cloud (Clodoald), à entrer dans les ordres. Cloud devient saint Cloud, une figure vénérée dans la tradition chrétienne. Les terres de Clodomir sont ensuite partagées entre Childebert et Clotaire.
À la mort de Thierry Ier, ses deux frères survivants tentent de se partager son royaume de Reims. Cependant, le fils de Thierry, Théodebert, résiste à leurs manœuvres, préservant son héritage. Il agrandit même son royaume en intégrant une partie de la Provence. À sa mort en 547, son fils Théodebald lui succède, mais ce dernier meurt sans descendance en 555, permettant à ses oncles de s’approprier ses terres.
Avec la mort de Théodebald (555) et de Childebert Ier (558), Clotaire Ier reste seul roi du royaume franc. Ce bref moment d’unité, entre 558 et 561, marque une exception dans l’histoire des Mérovingiens. Cependant, cette centralisation est éphémère, et à la mort de Clotaire Ier en 561, le royaume est à nouveau divisé entre ses héritiers.
La tradition de partage héréditaire affaiblit durablement la dynastie mérovingienne :
Malgré ces conflits, les Mérovingiens posent les bases d’une unité culturelle et religieuse en Gaule :
Bien que la domination mérovingienne s’étende largement sur la Gaule, ses incursions en Germanie restent limitées et éphémères. Les efforts pour intégrer des territoires comme la Thuringe, le pays des Alamans, et la Bavière dans leur sphère d’influence ne laissent pas de traces profondes.
En 515, les Danois envahissent le nord du royaume franc, attaquant le territoire de Thierry Ier. Ce dernier, occupé à contrer une menace thuringienne, délègue son fils Théodebert pour repousser les envahisseurs. Théodebert inflige une défaite décisive :
Bien que Grégoire de Tours mentionne une bataille navale, il s’agit probablement d’un combat terrestre à proximité des rivages.
La Thuringe, sous le roi Hermanfried, devient une cible des Francs. Thierry Ier mène deux expéditions contre ce royaume :
Théodebert, considéré comme l’un des Mérovingiens les plus brillants après Clovis, poursuit une politique d’expansion audacieuse :
Le fils de Théodebert, Théodebald, se révèle incapable de conserver les territoires italiens. En 553, le général byzantin Narsès anéantit l’armée franque au Volturne, mettant fin aux ambitions mérovingiennes au-delà des Alpes.
Après la mort de Théodebald en 555, Clotaire Ier hérite de la monarchie mérovingienne. Cependant, il est trop occupé à gérer les affaires de la Gaule pour défendre ou réaffirmer les conquêtes en Germanie.
À la mort de Clotaire Ier en 561, le royaume franc est partagé entre ses quatre fils selon la tradition mérovingienne :
Ce partage, comme souvent, sème les graines de conflits futurs. La mort de Caribert en 567 engendre un redécoupage chaotique, exacerbant les rivalités.
Les fils de Clotaire.
Le plus jeune des fils de Clovis, qui avait réuni donc toute la monarchie franque, avait laissé à sa mort (561) quatre fils. Un premier partage donna Paris à Caribert ou Charibert (561-567), Orléans et la Bourgogne à Gontran (561-592), Soissons et la Neustrie, entre la Loire et l'Escaut, à Chilpéric (561-584), Metz et l'Austrasie, qui s'étendait sur les deux rives du Rhin, à Sigebert (561-575). La ville même de Paris restait indivise et les frères s'engagèrent, par les serments les plus solennels, à n'y pénétrer chacun qu'avec la permission des autres.
Dès ce moment, mais surtout après la mort de Caribert (567), se manifeste un antagonisme qui ira croissant entre la Neustrie, plus riche, plus policée, héritière de la culture gallo-romaine, et l'Austrasie au sol ingrat, ayant plus fidèlement conservé le costume et les goûts guerriers des populations germaniques.
Les frères étaient fort différents. Chilpéric, frotté d'éducation latine, affectait d'aimer les lettres et de se connaître en théologie ; il faisait même de mauvais vers latins, ce qui ne l'empêchait pas d'être le plus violent de tous. Caribert se posait en juriste. Gontran avait des manières douces, que troublaient de furieux accès de colère.
La mort de Caribert, en 567, entraîna, avec un nouveau partage, un inimaginable chaos géographique, et aux difficultés qui en résultèrent s'ajouta une rivalité sanglante : celle de Brunehaut et de Frédégonde.
Les rivalités familiales sont amplifiées par l’antagonisme entre deux figures majeures : Brunehaut, épouse de Sigebert, et Frédégonde, maîtresse puis épouse de Chilpéric.
Cette rivalité alimente des guerres civiles incessantes entre les royaumes d’Austrasie et de Neustrie.
Chilpéric déclare la guerre à Sigebert après avoir restitué des terres à Brunehaut en compensation de l’assassinat de Galeswinthe. Sigebert, proclamé roi des Francs occidentaux, assiège Tournai. Frédégonde fait alors assassiner Sigebert par deux sicaires. Son fils, Childebert II, est proclamé roi d’Austrasie sous la régence de Brunehaut.
Chilpéric est assassiné en 584 à Chelles. Frédégonde prend la régence de la Neustrie pour son fils, Clotaire II, et lutte pour préserver son pouvoir face à Brunehaut.
En 587, le Traité d’Andelot scelle une alliance entre Gontran, Childebert II (fils de Sigebert), et la Bourgogne. Ce traité fixe les frontières des royaumes et établit un statut pour les leudes, consolidant temporairement la paix entre les factions.
Après la mort de Frédégonde en 597, Brunehaut domine l’Austrasie et la Bourgogne, mais sa soif de pouvoir la conduit à des excès :
Brunehaut, âgée de plus de 80 ans, subit un supplice atroce : après trois jours de torture, elle est attachée à la queue d’un cheval et traînée jusqu’à sa mort.
Le supplice de Brunehaut
Clotaire II réunit sous son autorité l’ensemble de l’Empire franc. Cependant, son pouvoir est limité par les leudes :
Clotaire II installe son fils Dagobert à la tête de l’Austrasie en 623 pour apaiser les nobles locaux. À la mort de Clotaire II, Dagobert hérite de l’ensemble du royaume franc, mais cède un territoire centré sur Toulouse à son frère Caribert II, qui meurt rapidement (630), permettant à Dagobert de réunifier temporairement le royaume.
En Austrasie, deux grandes familles dominent : celle d’Arnulf, évêque de Metz, et celle de Pépin de Landen, maire du palais. Leur union par mariage scelle une alliance qui leur permet de contrôler progressivement les affaires du royaume. Ce pouvoir croissant marque le début de l’ascension des maires du palais, futurs précurseurs de la dynastie carolingienne.
Grimoald, fils de Pépin de Landen et maire du palais d’Austrasie, profite de la mort de Sigebert II pour tenter de placer sa propre lignée sur le trône :
Cependant, cette tentative d’usurpation échoue. Les nobles austrasiens rejettent Grimoald et son fils après seulement sept mois de règne. Grimoald est capturé et livré à Clovis II, roi de Neustrie, qui ordonne son exécution.
Après la mort de Clovis II en 657, ses fils prennent la succession, sous l’influence de leur mère Bathilde et des maires du palais :
Clotaire III (657-673) :
Childéric II (660-675) :
Thierry III (675-691) :
Après 18 ans d’exil en Écosse, Dagobert II, fils de Sigebert II, revient en Austrasie et se fait proclamer roi en 674. Cependant, son règne est bref :
Le meurtre de Dagobert II marque la fin des ambitions royales en Austrasie. Thierry III, sous l’influence d’Ebroïn, maire de Neustrie, tente de réaffirmer son autorité. Cependant :
Le VIIᵉ siècle voit la montée en puissance des maires du palais, notamment la lignée des Pépinides, face à une monarchie mérovingienne affaiblie par les luttes dynastiques et les assassinats. Pépin de Herstal, vainqueur de Tertry en 687, établit la domination des maires d’Austrasie, jetant les bases de la dynastie carolingienne.
Après Thierry III (†691), la dynastie mérovingienne s’éteint progressivement dans l’ombre des maires du palais, qui exercent le véritable pouvoir :
Les Mérovingiens deviennent de simples figures symboliques, sans influence réelle, leur rôle réduit à légitimer les actions des maires du palais.
À la mort de Thierry IV en 737, Charles Martel ne désigne pas de successeur au trône. Il gouverne directement l’Empire franc, marquant une rupture claire avec la monarchie mérovingienne.
À la mort de Charles Martel (741), ses fils Carloman et Pépin le Bref se partagent le pouvoir. Cependant, ils doivent faire face à leur demi-frère Griffon, issu d’un second mariage, qui revendique une part du territoire.
En 742, Carloman et Pépin réintroduisent un roi mérovingien, Childéric III, fils de Chilpéric II, dans un but purement symbolique pour légitimer leur pouvoir.
En 751, Pépin le Bref, maître de la monarchie après le retrait de Carloman dans un monastère, dépose Childéric III. Avec le soutien du pape Étienne II, il se fait sacrer roi, inaugurant la dynastie carolingienne.
Après sa destitution, Childéric III est enfermé dans le monastère de Saint-Bertin, où il meurt en 755. Avec lui disparaît la lignée royale mérovingienne. Son fils Thierry vit également reclus, sans jouer de rôle politique.
Sous les Mérovingiens, la société franque est hiérarchisée en plusieurs groupes distincts, chacun ayant des droits, des devoirs, et des statuts variés :
Les Grands et les Gens d’Église :
Les Hommes Libres :
Les Colons :
Les Esclaves :
Au début de la domination mérovingienne, la société est marquée par une distinction entre Gallo-Romains et Barbares. Cette division se reflète dans le droit et les pratiques sociales :
Le wergeld (prix du sang) reflète cette hiérarchie sociale et ethnique :
La majorité des hommes libres deviennent des vassaux, c’est-à-dire des « serviteurs libres » d’un seigneur. Cette dépendance marque la transition vers une société féodale :
Les colons occupent un statut intermédiaire entre liberté et servitude :
Les esclaves constituent la classe la plus opprimée, assimilés à des biens matériels :
Bien que l’Église prône un adoucissement de leur condition, elle ne remet pas en question le système esclavagiste :
Descendants de serfs gallo-romains et germains :
Prisonniers de guerre :
Débiteurs :
Donateurs religieux :
Les marchés aux esclaves prospèrent dans les villes importantes du royaume. La majorité des esclaves étrangers sont des Slaves, d’où le mot « esclave » utilisé dans plusieurs langues européennes.
La société franque, sous les Mérovingiens, se caractérise par :
Malgré quelques évolutions, cette société reste marquée par une hiérarchie rigide et des inégalités extrêmes.